Paru en novembre 1861, quelques mois après la deuxième édition des “Fleurs du Mal”, ce sonnet contraste, par son climat d'apaisement, avec la détresse du poète à cette époque.
Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir; il descend; le voici:
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci.
Pendant que des mortels la multitude vile,
Sous le fouet du Plaisir, ce bourreau sans merci,
Va cueillir des remords dans la fête servile,
Ma Douleur, donne-moi la main; viens par ici,
Loin d’eux. Vois se pencher les défuntes Années,
Sur les balcons du ciel, en robes surannées;
Surgir du fond des eaux le Regret souriant;
Le Soleil moribond s’endormir sous une arche,
Et, comme un long linceul traînant à l’Orient,
Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.
1949. Clément Mathieu, professeur de musique sans emploi, accepte un poste
de surveillant dans un pensionnat de rééducation pour élèves difficiles. Il est
accueilli par l'homme à tout faire des lieux, le père Maxence, victime sous ses
yeux d'une mauvaise blague d'un élève. Ce qui vaut à Clément d'avoir un aperçu
immédiat des méthodes répressives appliquées par le directeur, Rachin. Malgré
l'antipathie de ce dernier à son égard et les écarts répétés de quelques fortes
têtes, le brave pion s'obstine à se rapprocher des enfants en cherchant une
autre voie que la sanction. Compositeur frustré, il a alors l'idée de ressortir
ses partitions pour les initier au chant...
La
mélodie du bonheur au Fond de l’Etang (commeaucinéma.com)
Le réalisateur Christophe Barratier nous raconte
avec LES CHORISTES une jolie fable sur la nature humaine. Il est très aisé de
comparer ce film à une partition de musique dans laquelle on entre avec
ferveur, un morceau de piano qui nous mène de crescendo en decrescendo, de
pause en silence, d’accords tonitruants en consonances plus douces et
finalement nous laisse un agréable souvenir. Gérard Jugnot joue ici le rôle
principal et le spectateur est littéralement séduit par le personnage qu’il
incarne : Clément Mathieu, nouveau pion du Fond de l’Etang, un internat
de rééducation pour mineurs. Mais aussi, un professeur de musique raté qui
découvre de vrais talents parmi les terreurs qu’il doit surveiller. Une
analogie est bien sûr clairement possible entre LES CHORISTES et le film que Gérard Jugnot a réalisé Monsieur Batignole, d’une part
parce que le co-scénariste, Philippe Lopes-curval est le même,
et d’autre part parce que Clément Mathieu ressemble à si méprendre à Mr
Batignole… On retrouve son côté à la fois touchant, émouvant, drôle et
attachant. Toutefois, le personnage de Clément Mathieu est plus léger, plus en
musique.
Là où le cinéaste Christophe Barratier est vraiment
original et réussit à nous convaincre, c’est qu’il ne fait pas du rôle
principal le pivot du film. En effet, dès le départ, on sait que Clément
Mathieu a été complètement oublié, qu’il n’a pas laissé de trace. C’est un
héros effacé, qui met en valeur un des jeunes élèves de sa chorale. Il sera le
vecteur du talent, sans jamais rien demander de plus. Et c’est cet aspect-là
qui rend vraiment le personnage incarné par Gérard Jugnot,
authentique.
La chorale est un régal, tous ces enfants ne pourront laisser indifférent même
le plus récalcitrant des spectateurs. Jean-baptiste Maunier, le jeune
chanteur prodige de la troupe, dont la véritable voix mélodieuse nous
accompagne tout au long du film, est un talent qu’il va falloir suivre de près.
On applaudit aussi avec énergie la prestation de François Berléand en directeur
d’établissement qui interprète avec brio et délectation les tortionnaires
cyniques d’enfants. Kad Merad, plus connu
pour son humour dévastateur que ses rôles sérieux, joue ici avec une grande
conviction… Maxence Perrin, alias
Pépinot, n’a qu’un petit rôle dans ce long-métrage, mais son personnage est un
véritable rayon de soleil.
Il y a peut-être un peu trop de bons sentiments dans LES CHORISTES, avec le
schéma déjà visité et revisité des gentils qui triomphent des méchants.
Certaines lenteurs se ressentent aussi dans le scénario qui est malgré cela
bien ficelé. Pourtant, un sourire s’agrippe à notre figure, une chanson
continue de trotter dans notre tête bien après le générique de fin et le tout
est plutôt plaisant.
Dans la 2ième
moitié du XII siècle les mœurs plus polies de la courtoisie provençale
gagnent le Nord de la France. C’est Aliénor
d’Aquitaine qui paraît avoir le plus contribué à y acclimater la courtoisie
du Midi, d’abord comme reine de
France (épouse de Louis VII), puis comme reine d’Angleterre, deux ans après son
second mariage avec Henri Plantagenet, conte d’Anjou et duc de Normandie,
devenu roi d’Angleterre en 1154. Aliénor aimait les artistes et s’entourait d’un
cour cultivé et raffiné. Cette
influence fut encore élargie par ses deux filles, Aélis de Blois, et surtout MARIE,
comtesse de Champagne. Cette dernière protectrice de Chrétien de Troyes lui imposait même certains thèmes
courtois ; elle organisait, dit-on, des tribunaux ou Cours d’amour où l’on discutait de subtils problèmes
de sentiment, prélude aux salons de nos précieuses du XVVII siècle
Elle est historiquement notre première poétesse et la
créatrice d'un genre nouveau dans la littérature française, celui du récit bref
qui deviendra la nouvelle sous la forme de lais
.
Désignant en même temps la source orale que Marie a recueillie pour la «mettre
en mémoire» et la forme littéraire qu'elle invente, le lai traduit une nouvelle
conception du travail poétique: la source des lais n'est plus un texte écrit
investi d'autorité, mais une tradition orale, à laquelle l'écrivain reconnaît
une vérité. Vérité d'ordre moral et psychologique car, au-delà du merveilleux
féérique présent dans nombre des lais de Marie, la grande aventure que ceux-ci
racontent, c'est l'irruption de l'amour dans une vie et la série d'épreuves
qu'il impose.
Elle laisse un Isopet
(recueil de fables imitées d'Ésope) et une série de Lais, inspirées de
Bretagne, dont douze nous sont parvenus.
-Dans le Lai du Chèvrefeuille, elle évoque Tristan. Chassé de la cour
du roi Marc et loin d’Yseult qu’il aime, il apprend qu’elle doit passer dans la
forêt où il vit. Il coupe une branche decoudrier, l’élague, la pare, y grave son nom
et la plante au milieu du sentier. En la voyant, Yseult devine que son ami est
caché dans les sous-bois; elle y
pénètre avec sa suivante. Ils ont un bref entretien où Tristan lui redit s
douleur de vivre loin d’elle. Il en est
deux comme du chèvrefeuille, lacé autour du coudrier. Ensemble, ils peuvent
bien durer; mais
vient-on à les séparer, le coudrier meurt et le chèvrefeuille avec :
Tristan coupa une branche de
coudrier
par le milieu et l'équarrit.
Quand il a préparé le bâton,
avec son couteau il écrit son
nom.
Si la reine le remarque,
car souvent elle guettait un
signe,
elle saura bien que le bâton
vient de son ami, quand elle le
verra :
il lui était déjà arrivé
de l'apercevoir ainsi.
Voici le contenu du message
inscrit sur le bâton dont j'ai
parlé :
longtemps Tristan était resté à
cet endroit,
y avait demeuré et avait attendu
pour guetter et pour trouver
un moyen de la voir,
car il ne pouvait vivre sans
elle.
Il en était de tous
deux
comme du chèvrefeuille
qui autour du coudrier
s'accroche.
Quand il l'enlace et le
saisit,
et qu'il s'est mis tout
autour du tronc,
ils peuvent bien vivre
ensemble ;
mais si quelqu'un
s'avise ensuite de les séparer,
le coudrier meurt
rapidement
et le chèvrefeuille
pareillement.
"Ma belle amie,
ainsi en est-il de nous :
ni vous sans moi ni moi
sans vous."
Lai du chèvrefeuille,
conservé dans un
manuscrit de la fin du XIIIe siècle
qui ont prévu la présentation de figures féminines dans l'art et dans la littérature
Ballata delle donne
di EDOARDO SANGUINETI
Quando ci penso, che il tempo è
passato,
le vecchie madri che ci hanno portato,
poi le ragazze, che furono amore,
e poi le mogli e le figlie e le nuore,
femmina penso, se penso una gioia:
pensarci il maschio, ci penso la noia.
Quando ci penso, che il tempo è venuto,
la partigiana che qui ha combattuto,
quella colpita, ferita una volta,
e quella morta, che abbiamo sepolta,
femmina penso, se penso la pace:
pensarci il maschio, pensare non piace.
Quando ci penso, che il tempo ritorna,
che arriva il giorno che il giorno raggiorna,
penso che è culla una pancia di donna,
e casa è pancia che tiene una gonna,
e pancia è cassa, che viene al finire,
che arriva il giorno che si va a dormire.
Perché la donna non è cielo, è terra
carne di terra che non vuole guerra:
è questa terra, che io fui seminato,
vita ho vissuto che dentro ho piantato,
qui cerco il caldo che il cuore ci sente,
la lunga notte che divento niente.
Femmina penso, se penso l'umano
la mia compagna, ti prendo per mano.