mercredi 27 août 2014

L'Angoisse, Poèmes Saturniens 1886 de Paul Verlaine - Commentaire de Karim Bessich et Vladimir Olivero



Voici l'intitulé du  dernier devoir de IIIe D, que mes élèves ont assez 
bien élaboré. Peut-être  y en aura-t-il quelqu'un souhaitant préparer sa
 "tesina", voici quelques  suggestions :







Autoportrait 









Devoir                      III D            

L’Angoisse

Nature, rien de toi ne m'émeut, ni les champs
Nourriciers, ni l'écho vermeil des pastorales
Siciliennes, ni les pompes aurorales,
Ni la solennité dolente des couchants.

Je ris de l'Art, je ris de l'Homme aussi, des chants,
Des vers, des temples grecs et des tours en spirales
Qu'étirent dans le ciel vide les cathédrales,
Et je vois du même oeil les bons et les méchants.

Je ne crois pas en Dieu, j'abjure et je renie
Toute pensée, et quant à la vieille ironie,
L'Amour, je voudrais bien qu'on ne m'en parlât plus.

Lasse de vivre, ayant peur de mourir, pareille
Au brick (1) perdu jouet du flux et du reflux (2),
Mon âme pour d'affreux naufrages appareille.
1)       Voilier, Brick-goëlette,  Navire à voiles à deux mâts. 2) marée

Paul Verlaine, « L’Angoisse », Poèmes Saturniens (1866)



Baudelaire : Spleen



Laforgue : Spleen



Corbière :   "Les Amours jaunes"


     Ma pensée est un souffle aride :
         C’est l’air. L’air est à moi partout.
Et ma parole est l’écho vide
  Qui ne dit rien – et c’est tout.







Voici les commentaires de  Karim Bessich et Vladimir Olivero
que vous allez retrouver dans  "I Quaderni del Cairoli" (2011)






Edvard Munch La Nuit étoilée (1901)






1)Essayez de mettre en lumière les divers moyens par lesquels Verlaine exprime les aspects de la tentation nihiliste à  laquelle il était alors en proie.


L’une après l’autre, Verlaine renie toutes les valeurs les plus importantes, en révélant leur essence  illusoire: la Nature, chantée par les poètes de l’Antiquité comme Virgile comme un refuge où vivre en paix et en harmonie, mais aussi célébrée par les romantiques pour sa magnifique beauté et sa puissance sauvage, ne l’émeut point; il rit « de l’Art », c’est-à-dire l’Idéal auquel un poète devrait tendre, et, ainsi, il renie la valeur de son propre travail ; il se rit de l’Homme en général et de toutes les illusions qu’il crée afin de rendre tolérable sa vie: les chants et les vers (c’est-à-dire, encore une fois, la poésie), la grandeur de l’architecture sacrée (et donc la religion), les valeurs morales qui distinguent entre Bien et Mal. Enfin, il arrive à admettre qu’ il ne croit plus du tout en Dieu, la mort duquel, annoncée quelques années après par Nietzsche, symbolise la chute de toute valeur. Le poète renie en général la pensée, vue comme cause de douleur inutile, et enfin même  la grande illusion , l’Amour. Il n’a plus envie de vivre, mais il n’a pas le courage de choisir le suicide, il se sent un jouet, proie de forces obscures et irrationnelles, externes à sa volonté qui désormais n’existe plus: son âme se prépare à sombrer dans les abîmes d’une terreur inconnue.

2) « Je ris de l’Art » , pourtant,  il a plus tard assez bien souligné dans un poème, qui est  une sorte de manifeste du symbolisme,  le rôle de l’Art  : présentez sa conception de la poésie.



Dans  l’Art Poétique , Verlaine affirme  que la poésie doit être avant tout musique: loin de la perfection limpide et impassible des parnassiens. Ce poète décadent et maudit, une définition qu’il a inventée lui-même pour Rimbaud,   refuse aussi la conception romantique de la poésie comme exercice d’éloquence et comme occasion pour traiter les thèmes sociaux. Il  dénonce la vulgarité de la rime, de la pointe ironique, la vacuité de la perfection formelle classique,  au contraire, il souhaite une poésie faite de nuances, de symboles (et donc, proche de la peinture impressionniste), une poésie qui refuse l’alexandrin, jugé trop lourd et formel, en le substituant avec le vers impair; celui-ci, en effet, est le seul capable de créer cette musicalité qui peut rapprocher la poésie de l’art total, c’est-à-dire l’art où la  musique, l’image et la parole se mêlent dans une unité parfaite et presque insaisissable. 

Karim Bessich  


1)Essayez de mettre en lumière les divers moyens par lesquels Verlaine exprime les aspects de la tentation nihiliste à  laquelle il était alors en proie.

Le poète utilise beaucoup de négations ("rien", "ni..ni..ni") pour nier ce qui souvent provoque des émotions. Dans le deuxième quatrain Verlaine se moque, rit des valeurs qui sont généralement acceptées comme guide pour l'homme ("l'Art", "les temple grecs" et "les cathédrales", donc la religion). En outre, Verlaine veut rejeter toute pensée, Dieu, l'Amour, c'est-à-dire ce qui caractérise l'existence humaine. En niant ce qui détermine l'homme, il arrive au nihilisme et donc au néant. À ce point l'âme, "lasse de vivre", n'est plus liée à aucune chose et elle est libre d'être emmenée par "les flux" jusqu'aux "naufrages". Le poète ne trouve pas de valeurs  pour lesquelles il puisse souhaiter  vivre.

2) « Je ris de l’Art » , pourtant,  il a plus tard assez bien souligné dans un poème, qui est  une sorte de manifeste du symbolisme,  le rôle de l’Art  : présentez sa conception de la poésie.


"L'Art pour l'Art" est la conception qui réunit Verlaine au poètes décadents et au mouvement  parnassien. L'Art doit être le but de chaque poème  et parfois  Verlaine écrit seulement pour montrer son habileté rhétorique. L'art le plus important est la musique, et Verlaine souligne le rythme de ses poèmes : Le mètre doit être indéfini, le nombre des syllabes et les rimes doivent varier,  le vers Impair devient ainsi essentiel. Les images sont très efficaces, selon la pensée des impressionnistes. La leçon baudelairienne est souvent présente dans le poèmes de Verlaine et il s'inspire aussi de Rimbaud comme dans  Romances sans paroles. La poésie représente les sentiments les plus forts éprouvés par le poète, ce qui l’amène à  introduire le fait divers, personnel notamment.

Vladimir Olivero

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire