mercredi 3 septembre 2014

ESABAC : Programmes de Langues et Littératures Italienne et Française et d' Histoire









Programme de langues et littératures italienne 
et française visant la délivrance de l’Esame di 
stato et du baccalauréat 

  














Essai bref : "Printemps : saison d’espoirs, saison de désespoirs"











  

LICEO CLASSICO “E. CAIROLI” VARESE



BAC BLANC



Prova di: LINGUA E LETTERATURA FRANCESE

 
  

Printemps : saison d’espoirs, saison de désespoirs 



« April is the cruellest month, breeding
Lilacs out of the dead land, mixing
Memory and desire, stirring
Dull roots with spring rain”

T.S. Eliot The Waste land





Développez une réflexion personnelle sur ce thème, en faisant 

éventuellement référence à d’autres œuvres littéraires que vous avez

 lues (600 mots environ). 

Avril 


Déjà les beaux jours, - la poussière,
Un ciel d’azur et de lumière,
Les murs enflammés, les longs soirs ; -
Et rien de vert : - à peine encore
Un reflet rougeâtre décore
Les grands arbres aux rameaux noirs !

Ce beau temps me pèse et m’ennuie.

- Ce n’est qu’après des jours de pluie
Que doit surgir, en un tableau,
Le printemps verdissant et rose,
Comme une nymphe fraîche éclose
Qui, souriante, sort de l’eau.



Gérard de Nerval, Odelettes



Mai 


Le mai le joli mai en barque sur le Rhin
Des dames regardaient du haut de la montagne
Vous êtes si jolies mais la barque s'éloigne
Qui donc a fait pleurer les saules riverains

Or des vergers fleuris se figeaient en arrière
Les pétales tombés des cerisiers de mai
Sont les ongles de celle que j'ai tant aimée
Les pétales flétris sont comme ses paupières

Sur le chemin du bord du fleuve lentement
Un ours un singe un chien menés par des tziganes
Suivaient une roulotte traînée par un âne
Tandis que s'éloignait dans les vignes rhénanes
Sur un fifre lointain un air de régiment

Le mai le joli mai a paré les ruines
De lierre de vigne vierge et de rosiers
Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers
Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes



Apollinaire, Alcools











Chanson de la plus haute Tour 




Oisive jeunesse
À tout asservie,
Par délicatesse
J'ai perdu ma vie.
Ah! que le temps vienne
Où les cœurs s'éprennent.

Je me suis dit : laisse,
Et qu'on ne te voie :
Et sans la promesse
De plus hautes joies.
Que rien ne t'arrête
Auguste retraite.

J'ai tant fait patience
Qu'à jamais j'oublie;
Craintes et souffrances
Aux cieux sont parties.
Et la soif malsaine
Obscurcit mes veines.

Ainsi la Prairie
À l'oubli livrée,
Grandie, et fleurie
D'encens et d'ivraies,
Au bourdon farouche
De cent sales mouches.

Ah! Mille veuvages
De la si pauvre âme
Qui n'a que l'image
De la Notre-Dame!
Est-ce que l'on prie
La Vierge Marie ?

Oisive jeunesse
À tout asservie,
Par délicatesse
J'ai perdu ma vie.
Ah! que le temps vienne
Où les cœurs s'éprennent.


Arthur Rimbaud  Derniers vers 







Ben venga maggio


Ben venga maggio
e ‘l gonfalon selvaggio!
Ben venga primavera,
che vuol l’uom s’innamori:
e voi, donzelle, a schiera
con li vostri amadori,
che di rose e di fiori,
vi fate belle il maggio,
venite alla frescura
delli verdi arbuscelli.
Ogni bella è sicura
fra tanti damigelli,
ché le fiere e gli uccelli
ardon d’amore il maggio.
Chi è giovane e bella
deh non sie punto acerba,
ché non si rinnovella
l’età come fa l’erba;
nessuna stia superba
all’amadore il maggio
Ciascuna balli e canti
di questa schiera nostra.
Ecco che i dolci amanti
van per voi, belle, in giostra:
qual dura a lor si mostra
farà sfiorire il maggio.
Per prender le donzelle
si son gli amanti armati.
Arrendetevi, belle,
a’ vostri innamorati,
rendete e cuor furati,
non fate guerra il maggio.
Chi l’altrui core invola
ad altrui doni el core.
Ma chi è quel che vola?
è l’angiolel d’amore,
che viene a fare onore
con voi, donzelle, a maggio.
Amor ne vien ridendo
con rose e gigli in testa,
e vien di voi caendo.
Fategli, o belle, feste.
Qual sarà la più presta
a dargli el fior del maggio?
-Ben venga il peregrino.-
-Amor, che ne comandi?-
-Che al suo amante il crino
ogni bella ingrillandi,
ché gli zitelli e grandi
s’innamoran di maggio.-



Agnolo  Ambrogini, detto Poliziano (1454-1494) 






  

vizavi-edu.it  

  

  



Boris Vian "A tous les enfants"



 À tous les enfants qui luttent contre la guerre ...




par Joan Baez


A tous les enfants qui sont partis le sac à dos
Par un brumeux matin d'avril
Je voudrais faire un monument
A tous les enfants qui ont pleuré le sac au dos
Les yeux baissés sur leurs chagrins
Je voudrais faire un monument

Pas de pierre, pas de béton, ni
de bronze qui devient vert sous la morsure
aiguë du temps
Un monument de leur souffrance
Un monument de leur terreur
Aussi de leur étonnement

Voilà le monde parfumé, plein de
rires, plein d'oiseaux bleus, soudain
griffé d'un coup de feu
Un monde neuf où
sur un corps qui va tomber
grandit une tache de sang

Mais à tous ceux qui sont restés les pieds
au chaud, sous leur bureau en calculant
le rendement de la guerre qu'ils ont voulue
A tous les gras, tous les cocus qui
ventripotent dans la vie et
comptent et comptent leurs écus
A tous ceux-là je dresserai le monument
qui leur convient avec la schlague avec
le fouet, avec mes pieds, avec mes poings
Avec des mots qui colleront sur leurs
faux-plis, sur leurs bajoues, des marques
de honte et de boue.



    





memoiresdeprof.blogspot


Jean Ferrat Pauvre Boris 






Boris Vian à la Bibliothèque Nationale de France ... voici sa chanson culte "Monsieur le Président..."


















Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
Je m'en vais déserter

Depuis que je suis né
J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens:
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer

La  version initiale des 2 derniers vers :
"que je tiendrai une arme ,
et que je sais tirer ..."
A été modifiée  de son ami Mouloudji,
pour conserver le côté pacifiste de la chanson.
Mais pour bien comprendre la dispute il faut lire la lettre 
que Boris Vian écrivit à M Faber,  un conseiller municipal…
comme on en trouve souvent partout…


en réponse à la censure du Déserteur (1954)










La première interprétation a été diffusée


en mai 1954 créée par Mouloudji...









Celle de Marc Robine










Et celle de Renaud







Monsieur le président
Je vous fais une bafouille
Que vous lirez sûrement
Si vous avez des couilles
Je viens de recevoir
Un coup d´fil de mes vieux
Pour m´prévenir qu´les gemdarmes
S´étaient pointés chez eux
J´ose pas imaginer
C´que leur a dit mon père
Lui, les flics, les curés
Et pis les militaires
Les a vraiment dans l´nez
P´t-être encore plus que moi
Dès qu´il peut en bouffer
L´vieil anar´ y s´gêne pas
L´vieil anar´ y s´gêne pas

Alors y parait qu´on m´cherche
Qu´la France a besoin d´moi
C´est con, j´suis en Ardèche
Y fait beau, tu crois pas
J´suis là avec des potes
Des écolos marrants
On a une vieille bicoque
On la retappe tranquillement
On fait pousser des chèvres
On fabrique des bijoux
On peut pas dire qu´on s´crève
L´travail, c´est pas pour nous
On a des plantations
Pas énormes, trois hectares
D´une herbe qui rend moins con
Non, c´est pas du ricard
Non, c´est pas du ricard

Monsieur le président
Je suis un déserteur
De ton armée de glands
De ton troupeau d´branleurs
Ils auront pas ma peau
Toucheront pas à mes cheveux
J´saluerai pas l´drapeau
J´marcherai pas comme les bœufs
J´irai pas en Allemagne
Faire le con pendant douze mois
Dans une caserne infame
Avec des plus cons qu´moi
J´aime pas recevoir des ordres
J´aime pas me lever tôt
J´aime pas étrangler le borgne
Plus souvent qu´il ne faut
Plus souvent qu´il ne faut

Puis surtout c´qui m´déplait
C´est que j´aime pas la guerre
Et qui c´est qui la fait
Ben c´est les militaires
Ils sont nuls, ils sont moches
Et pis ils sont teigneux
Maintenant j´vais t´dire pourquoi
J´veux jamais être comme eux
Quand les Russes, les Ricains
Feront péter la planete
Moi, j´aurais l´air malin
Avec ma bicyclette
Mon pantalon trop court
Mon fusil, mon calot
Ma ration d´topinambour
Et ma ligne Maginot
Et ma ligne Maginot

Alors me gonfle pas
Ni moi, ni tous mes potes
Je serai jamais soldat
J´aime pas les bruits de bottes
T´as plus qu´a pas t´en faire
Et construire tranquilos
Tes centrales nucléaire
Tes sous-marins craignos
Mais va pas t´imaginer
Monsieur le président
Que j´suis manipulé
Par les rouges ou les blancs
Je n´suis qu´un militant
Du parti des oiseaux
Des baleines, des enfants
De la terre et de l´eau
De la terre et de l´eau

Monsieur le président
Pour finir ma bafouille
J´voulais t´dire simplement
Ce soir on fait des nouilles
A la ferme c´est l´panard
Si tu veux, viens bouffer
On fumera un pétard
Et on pourra causer
On fumera un pétard
Et on pourra causer










Article "Philosophe" de Dumarsais, Encyclopédie , XII (1765), Travaux des élèves Antonella Innocenzio et Laura Tripaldi








L'École d'Athènes                                                                                               

Raffaello, la Chambre de la Signature (les Stanze) des Musei Vaticani


Commentaire dirigé :  Littérature- Philosophie :

Dumarsais : Encyclopédie (1751-1772), article "Philosophe"

 Les autres hommes sont déterminés à agir sans sentir ni connaître les causes qui les font mouvoir, sans même songer qu'il y en ait. Le philosophe au contraire démêle les causes autant qu'il est en lui, et souvent même les prévient, et se livre à elles avec connaissance: c'est une horloge qui se monte, pour ainsi dire, quelquefois elle-même. Ainsi il évite les objets qui peuvent lui causer des sentiments qui ne conviennent ni au bien-être, ni à l'être raisonnable, et cherche ceux qui peuvent exciter en lui des affections convenables à l'état où il se trouve. La raison est à l'égard du philosophe ce que la grâce est à l'égard du chrétien. La grâce[1][1] détermine le chrétien à agir; la raison détermine le philosophe.
             Les autres hommes sont emportés par leurs passions, sans que les actions qu'ils font soient précédées de la réflexion : ce sont des hommes qui marchent dans les ténèbres; au lieu que le philosophe, dans ses passions mêmes, n'agit qu'après la réflexion; il marche la nuit, mais il est précédé d'un flambeau.
             La vérité n'est pas pour le philosophe une maîtresse qui corrompe son imagination, et qu'il croie trouver partout; il se contente de la pouvoir démêler où il peut l'apercevoir. Il ne la confond point avec la vraisemblance; il prend pour vrai ce qui est vrai, pour faux ce qui est faux, pour douteux ce qui est douteux, et pour vraisemblance ce qui n'est que vraisemblance. Il fait plus, et c'est ici une grande perfection du philosophe, c'est que lorsqu'il n'a point de motif pour juger, il sait demeurer indéterminé [...]
            L'esprit philosophique est donc un esprit d'observation et de justesse, qui rapporte tout à ses véritables principes; mais ce n'est pas l'esprit seul que le philosophe cultive, il porte plus loin son attention et ses soins.
              L'homme n'est point un monstre qui ne doive vivre que dans les abîmes de la mer ou dans le fond d'une forêt : les seules nécessités de la vie lui rendent le commerce des autres nécessaire et dans quelqu'état où il puisse se trouver, ses besoins et le bien-être l'engagent à vivre en société
[2][2]. Ainsi la raison exige de lui qu'il connaisse, qu'il étudie, et qu'il travaille à acquérir les qualités sociables.
            Notre philosophe ne se croit pas en exil dans ce monde
[3][3]; il ne croit point être en pays ennemi; il veut jouir en sage économe des biens que la nature lui offre; il veut trouver du plaisir avec les autres; et pour en trouver, il faut en faire ainsi il cherche à convenir à ceux avec qui le hasard ou son choix le font vivre et il trouve en même temps ce qui lui convient: c'est un honnête homme qui veut plaire et se rendre utile […]
            Le vrai philosophe est donc un honnête homme qui agit en tout par raison, et qui joint à un esprit de réflexion et de justesse les mœurs et les qualités sociales. Entez
[4][4] un souverain sur un philosophe d’une telle trempe, et vous aurez un souverain parfait.

[1] Grâce : aide ou faveur dispensée par Dieu sans laquelle le chrétien ne peut espérer trouver la voie du Bien, la voie du Salut.
 [2] Ce passage est sans doute une critique de la thèse défendue par Rousseau selon laquelle l’homme, naturellement bon, est perverti par la vie en société.
 [3] Ce monde : le monde des hommes opposé à l’autre monde, le paradis, le monde des âmes : allusion polémique à la doctrine chrétienne selon laquelle notre monde imparfait est le produit de la Chute originelle, la faute d’Adam et Eve.
 [4] Enter = greffer



  



L’article « philosophe » de l’Encyclopédie, qui a été rédigé par le grammairien Dumarsais, est un brillant éloge de la figure de l’homme des Lumières. Ce portrait prodigieux présent le philosophe comme un modèle intellectuel, mais aussi moral qui incarne l’esprit du XVIIIe siècle. L’auteur exprime la thèse globale de l’article au début du texte, en affirmant que « la raison détermine le philosophe », ensuite il soutient et confirme cette assertion au moyen d’une réflexion sur les caractéristiques principales de ce personnage. 

Le philosophe agit seulement âpres avoir réfléchi attentivement, à cause de cela il est défini comme déterminé par sa raison et son attitude est opposée à celle des autres hommes, qui  au contraire sont emportés par leur passions. L’homme des Lumières se distingue aussi dans la quête de la vérité : il ne la confond pas, il ne veut pas l’obtenir toujours mais seulement quand il est sûr qu’elle est réelle.

Dans les cinq derniers paragraphes de l’article il y a une analyse du rapport entre le philosophe et la société. Dans cette partie l’auteur souligne que l’homme des Lumières n’utilise pas seulement l’esprit pour soi-même, mais il veut aussi vivre  activement et positivement dans la société. Le philosophe est un homme qui est poussé à vivre entre les autres par ses propres besoins et qui est poussé à étudier et à s’améliorer par sa raison. Il est citoyen du monde et veut y vivre librement et vigoureusement.
L’amour pour la société et l’envie d’être utile rendent le philosophe honnête et probe : c’est donc la raison la cause de la probité des hommes.
Dans la conclusion du texte, Dumarsais reprend la thèse initiale et termine son portrait en élogeant le philosophe pour son attitude très cohérente.
Cet article donc est une louange exhaustive des valeurs des Lumières, mais aussi une exposition d’une sorte de morale laïque fondée uniquement sur la raison. Dans ce cadre le philosophe devient la référence culturelle et morale


Antonella Innocenzio







Dans l'article “Philosophe” de l'Encyclopédie, écrit par Dumarsais, on peut retrouver toutes les caractéristiques idéales de l'intellectuel des Lumières, aussi bien d'un point de vue moral que social.

Il s'agit d'un éloge dans lequel l'auteur utilise un langage emphatique, où l’on trouve beaucoup de figures de style  qui donnent au texte une grande puissance expressive. L'une des métaphores les plus importantes se trouve au début du texte, dans le deuxième paragraphe:  dans ce passage, l'auteur fait une distinction entre ceux qui n'utilisent pas leur entendement et ceux qui l'utilisent (c'est-à-dire les philosophes) à l'aide de la métaphore de la lumière, symbole de la raison, déjà utilisée  par Francis Bacon dans le “Novum Organum”. Cette métaphore a la fonction de souligner le rôle de la raison comme guide, comme “flambeau” qui  aide les hommes  dans la recherche de la vérité. En fait, c'est la vérité  le but du  philosophe, mais ce n'est pas une recherche sans fondement; il ne voit pas cette lumièrepartout, il se contente de la “démêler où il peut l'apercevoir”. Le philosophe est donc un homme honnête, qui connaît les difficultés dans son constant processus de   recherche.


À partir de la ligne 16, le texte se concentre sur le rôle social du philosophe. Il y a une critique subtile  à ces philosophes qui se sont isolés et qui ont fui le monde, tandis  que l'intellectuel des Lumières aime communiquer avec les autres et reconnaît aussi son rôle de guide dans le domaine politique et économique. À cet égard, Dumarsais cite  Térence “Homo sum, humani a me nihin alienum puto” pour souligner le fait que l'homme,  en tant que  “animal social”, ne doit pas refuser la communication, qui est fondamentale pour le   développement de la connaissance universelle.


Dans la dernière partie du texte, Dumarsais fait référence à la rigueur
morale typique du philosophe, qui veut être reconnu comme honnête par la société dans laquelle il vit. L'importance de la dignité sociale du philosophe est mise en évidence par le passage “La société civile est [...] une divinité pour lui sur la terre” à la ligne 34. Cette expression nous montre aussi qu'avec les Lumières le rôle de la religion officielle a été remplacé par celui de la morale laïque, marquée par la probité et par la tolérance.


En conclusion, on peut dire que ce passage résume tous les aspects les plus importants des Lumières, aux niveaux social, politique et intellectuel.

  
Laura Tripaldi






Emmanuel Kant, Qu’est-ce que les Lumières?(1784), Commentaires de Andrea Caloni, Martina Guglielmi, Antonella Innocenzio, David Leorati, Laura Tripaldi, sur proposition de Mme Veronica Ponzellini.






 "I Quaderni del Cairoli" (2011)



Emmanuel KantQu’est-ce que les lumières ?  (1784)

Les lumières, c’est pour l’homme sortir d’une minorité qui n’est imputable qu’à lui. La minorité, c’est l’incapacité de se servir de son entendement sans la tutelle d’un autre. C’est à lui seul qu’est imputable cette minorité dès lors qu’elle ne procède pas du manque d’entendement, mais du manque de résolution et de courage nécessaires pour se servir de son entendement sans la tutelle d’autrui. Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement : telle est donc la devise des Lumières.
    La paresse et la lâcheté sont causes qu’une si grande partie des hommes affranchis depuis longtemps par la nature de toute tutelle étrangère, se plaisent cependant à rester leur vie durant des mineurs ; et c’est pour cette raison qu’il est si aisé à d’autre de s’instituer leurs tuteurs. Il est si commode d’être mineur. Si j’ai un livre qui a de l’entendement pour moi , un directeur spirituel qui a de la conscience pour moi, un médecin qui pour moi décide de mon régime etc., je n’ai pas besoin de faire des efforts moi-même. Je ne suis point obligé de réfléchir, si payer suffit ; et d’autres se chargeront pour moi l’ennuyeuse besogne. […]
    Il est donc difficile pour tout homme pris individuellement de se dégager de cette minorité devenue comme une seconde nature. Il s’y est même attaché et il est alors réellement incapable de se servir de son entendement parce qu’on ne le laissa jamais en fait l’essai. Préceptes et formules, ces instruments mécaniques destinés à l’usage raisonnable ou plutôt au mauvais usage de ses dons naturels, sont les entraves de cet état de minorité qui se perpétue.
    Mais qui les rejetterait ne ferait cependant qu’un saut mal assuré au-dessus du fossé même plus étroit, car il n’a pas l’habitude d’une telle liberté de mouvement. Aussi sont-ils peu nombreux ceux qui ont réussi, en exerçant eux-mêmes leur esprit, à se dégager de cette minorité tout en ayant cependant une démarche assurée.
    Qu’un public en revanche s’éclaire lui-même est davantage possible ; c’est même, si seulement on lui en laisse la liberté, pratiquement inévitable. Car, alors, il se trouvera toujours quelques hommes pensant par eux-mêmes, y compris parmi les tuteurs officiels du plus grand nombre, qui, après voir rejeté eux-mêmes le joug de la minorité, rependront l’esprit d’une estimation raisonnable de sa propre valeur et de la vocation de chaque homme a penser par lui-même. […]
    Mais ces Lumières n’exigent rien d’autre que la liberté ; et même la plus inoffensive de toutes les libertés, c’est-à-dire celle de faire un usage public de sa raison dans tous les domaines.                                        

Trad. J. Mondot, université de Saint-Étienne, 1991







Dans ce texte Kant présente la conception qui est à la base de la philosohie des Lumières : la liberté.
Pour Kant la liberté est la condition essentielle de l'action humaine, exercée à travers la raison. Quand il écrit cet article, il est très intéressé à la préparation de la Révolution Française, fondée sur des théories anticipées par les Lumières.
Par cette philosophie, selon Kant, l'homme sort d'une condition de “minorité”, c'est à dire d'une situation dans laquelle il ne se sert pas de son entendement. L'homme est coupable de cette minorité, parce qu'il vit passivement sous la tutelle de “tuteurs” sans avoir le courage de s'en libérer.
Il est aussi “commode d'être mineur”, car on ne doit pas faire l'effort de penser. En parlant de la minorité, Kant fait aussi une critique au principe d'autorité: les “tuteurs” desquels il parle sont les savants de la Scolastique ou bien soumis aux systèmes politiques absolus.
Ils souhaitent  que les gens restent dans leur ignorance pour mieux les contrôler. On retrouve cette critique aussi au XVII siècle, dans la période de la Révolution scientifique, surtout avec Bacon, qui invite les hommes à se servir de leur raison, plutôt que de l'autorité des anciens pour connaître la réalité, mais c'est une exhortation encore au niveau théorique. Avec les Lumières, l'invitation à utiliser sa raison est plus pratique, a une signification morale aussi. Kant synthétise leur message en deux mots: “sapere aude”, aie le courage d'utiliser ton entendement librement “dans tous les domaines”. C'est-à-dire qu'on doit examiner la réalité entière avec la raison, et donc, à partir d'un changement intellectuel, le passage de la “minorité” à la “majorité”, on arrive à avoir un rôle actif dans le monde: exercer sa liberté signifie s'affranchir des autorités intellectuelles et avoir une partie active dans tous les domaines de la société. Ces philosophes soutiennent donc la notion  d' “engagement”: ils analysent la réalité et proposent des changements concrets. Ils exaltent le modèle politique libéral anglais parce qu'il garantit les droits civils et politiques aux citoyens. Montesquieu propose la séparation des pouvoirs de l'État, Voltaire une monarchie éclairée.
Dans le domaine religieux les Lumières n'acceptent pas les convictions de la Contre-réforme et l'autorité de l'Eglise; dans celui économique les physiocrates proposent le modèle du libéralisme économique.
Il s'agit d'une utilisation de la raison dans un but pratique, le progrès de la société.
La condition nécessaire pour cet examen complet est la confiance en sa raison. Kant ne parle jamais d'une différence d'entendement entre les hommes, mais d'une différente utilisation de leur raison. Selon les Lumières la raison est le trait qui rend égaux tous les hommes et constitue la source de leur dignité. C'est une conception qui trouve ses fondements dans la situation historique: avec les Révolutions anglaises, les parlements et les classes sociales les plus actives avaient affirmé leur droits contre l'absolutisme en proposant non seulement un modèle politique libéral exemplaire, mais aussi une réflexion profonde sur le rôle et les droits de l'homme et sur sa liberté civile et culturelle (Habeas Corpus, Bill of Rights).
Les philosophes des Lumières ont repris cette pensée, ce qui démontre leur attention aux mouvements politiques,  mais ils ont souligné que la révolution culturelle doit se développer par le haut pour que les gens soient conscients de cette dignité et puissent l'exercer.
Leur rôle donc est celui d'émanciper l'intelligence humaine, pour rejoindre l'état de majorité duquel Kant parle.
Kant conclut son analyse par  une considération optimiste: le message des Lumières exige seulement la liberté intellectuelle, qui est inoffensive, mais qui aura un impact révolutionnaire.
Tous les événements historiques les plus importants du XVII et du XVIII siècle, c'est-à-dire l'émancipation religieuse, la naissance du modèle libéral anglais et aussi de celui démocratique aux États-Unis, l'affirmation de la bourgeoisie, la naissance de l'industrie et la Révolution scientifique, trouvent leur expression culturelle dans la pensée des Lumières, un message de liberté intellectuelle pour utiliser la raison humaine dans tous les domaines pour le progrès social.
Kant aime ce message d'émancipation de la minorité, qui était devenue une “seconde nature” pour les hommes, et assiste à la conséquence la plus importante de ce mouvement: la Révolution Française, expression de la révolte contre le système de l'absolutisme, qui était fondé sur l'oppression de la raison humaine.
“Sapere aude” est un message très simple, qui fait référence à la forme de liberté “la plus inoffensive”, mais aussi qui peut changer le monde.
                                                                                                                                                        Andrea Caloni



“Les Lumières n’exigent rien d’autre que la liberté”. C’est ce concept que Emmanuel Kant soutient avec conviction dans le texte « Qu’est ce que les Lumières ? » :l’homme des XVIII et  XIX siècles a besoin de liberté. La liberté est défendue par les Lumières comme le droit nécessaire pour l’homme de penser et de s’exprimer sans limites dues à la politique et à la religion. En effet, depuis le XVIII siècle, en Europe se diffuse une volonté d’émancipation par la connaissance, qui remet en cause la tradition, vue comme un ensemble de préjugés, et qui voit la raison comme moyen pour arriver à la vérité. La liberté est donc entendue aussi comme un refus des préjugés, des anciennes convictions et elle affirme l’usage public et critique de la raison dans touts les domaines du savoir.
Par rapport au texte, on peut relever que c’est la volonté et la nécessité de sortir d’une période caractérisée par la « minorité », c’est-à-dire l’incapacité de l’homme de se servir de sa raison sans l’aide des autres, le fil rouge de la pensée de Kant. Par contre, les Lumières sont celles qui veulent sortir de cette minorité, ce sont  les hommes qui  veulent essayer d’accroître la connaissance dans toutes les compétences  et qui ont le courage de se servir de leur propre entendement sans la tutelle des convictions précédents, c’est-à-dire la philosophie scolastique, les connaissances  aristotéliques et les préceptes de l’église. En effet, on peut affirmer que surtout la « scolastique » était un système caractérisé par des  dogmes qui étaient acceptés passivement per les hommes. L’homme du Moyen  Age et les étudiants qui voient dans la scolastique et dans le système aristotélique la vérité sur la réalité et sur le monde ne sont pas capables de sortir de cette minorité, puisqu’ils manquent de résolution et du courage nécessaire pour penser eux-mêmes. « Sapere aude » : Kant et les Lumières exhortent à avoir le courage de connaître, sans ni peur ni préjugés.
Ensuite, l’auteur affirme la difficulté de sortir de la minorité : « il est si commode d’être mineurs». La paresse et la lâcheté sont les causes pour lesquelles l’homme décide de laisser aux autres la possibilité de devenir leurs tuteurs. Aussi, on n’est pas obligés de réfléchir par soi-même  si on est dans la condition dans laquelle on peut  se baser sur des dogmes déjà formulés et sur des personnes qui pensent  à notre place  (l’utilisation de la raison est  parfois très épuisante).  Cette minorité est devenue  très influente par rapport  au «progrès » de l’humanité (qui reste presque nul si l’homme reste en minorité!) et on n’a pas l’habitude de se servir de son propre entendement parce qu’on n’a jamais la possibilité d’essayer de penser, si  on est habitués à accepter , sans sens critique, les impositions des autres. Mais, en  conclusion, Kant soutient aussi que « On se trouvera toujours des hommes pensant par eux-mêmes » si on leur laisse la liberté, qui est la condition qui permet d’utiliser la raison : voilà la majorité et le parcours qui arrive au progrès de l’humanité. Donc, d’après Kant l’aspect le plus important est la liberté d’ordre intellectuelle, qui se manifeste dans les droits civils de l’homme. Pour exercer le libre arbitre, la liberté de penser et de s’exprimer, l’homme doit avoir la volonté et le courage, c'est-à-dire des qualités morales, qui lui permettent le progrès et l’émancipation : les qualités morales supportent les qualités intellectuelles.
On peut donc affirmer que les Lumières veulent remettre en cause la société, caractérisée par la « minorité », pour permettre le libre examen des les connaissances anciennes, qui apporte le progrès. Kant est sans aucun doute le philosophe le plus important de l’âge des Lumières, mais on doit relever que la volonté de justifier et expliquer la réalité par la raison est née au XVI siècle avec la révolution scientifique et ensuite s’est développée avec Descartes et le rationalisme. D’abord, les humanistes et les hommes de la renaissance donnent une grande importance à l’action humaine qui favorise le progrès vers le bonheur et la richesse.
En conclusion le processus d’émancipation de l’homme de la subordination complète à Dieu, des préjugés et de la tradition, par la raison et la liberté, et donc par l’action humaine, se développe depuis le XV siècle et trouve en Kant son sommet.
Martina Guglielmi




  



De 1784 à 1786 le philosophe prussien Emmanuel Kant publie des articles pour expliquer l’essence des Lumières, un courant culturel et philosophique, qui s’est  répandu en Europe au XVIIIe siècle. Les philosophes des lumières font confiance uniquement à la raison humaine, instrument qui peut reconnaître le vrai savoir en appliquant la méthode scientifique. Kant est le dernier et plus grand représentant des lumières. Il  écrit le texte « qu’est-ce que le lumières ? » avec une visée didactique quelques années avant la Révolution française et quelques années après la Révolution américaine, deux événements qui affectent beaucoup sa pensée. Kant exalte le modèle politique libéral anglais et le modèle démocratique américain ; il soutient l’engagement politique et la valeur inconditionnelle de la raison. Il admire la lutte du peuple français pour s’affranchir d’une monarchie dominant, pour chercher la démocratie et pour retrouver la liberté.
Dans cet exposé  Kant cherche à donner le principe essentiel des Lumières : la liberté. A son époque il y avait des problèmes importants, en particulier le pouvoir politique était encore lié à une domination absolue et à la religion. La puissance de l’église influait énormément sur la liberté personnelle des gens. Dans ce contexte selon lui, il était encore plus nécessaire  de comprendre l’importance de la liberté politique, d’esprit, intellectuelle, soutenue par le Lumières.
Kant préconise la raison pour accéder à la liberté : celui qui peut profiter librement de sa raison, celui qui est responsable pour lui-même et qui pense par soi-même est « majeur » ; au contraire celui qui est soumis et dépendant des autres est « mineur ». Le « mineur »  n’est pas capable de choisir par soi-même, il a besoin de « tuteurs », c’est-à-dire de quelqu’un qui dirige  son entendement en  absence d’émancipation et de jugement autonome.
Kant analyse la cause de cette minorité et il affirme que la faute de cela est imputable seulement à l’homme, parce que il ne manque pas d’entendement, il manque plutôt du courage nécessaire. La liberté implique l’angoisse du choix et la responsabilité ; au contraire être « mineur »est plus facile et confortable, c’est le refus de sa propre responsabilité, c’est le choix de profiter de tous ceux qui peuvent réfléchir et décider  à notre place. Kant parle d’obéissance volontaire qui produit une minorité intellectuelle.
Selon l’auteur certains hommes préfèrent la dépendance à cause de leur paresse et leur lâcheté et après longtemps la minorité devient comme une seconde nature. Il est très difficile de se libérer de la minorité, quand elle se présente comme normal et permanente, quand elle devient une habitude : dans ce cas l’homme devient réellement incapable de se servir de son entendement parce que il n’a jamais essayé de le faire.  Kant donc semble avoir une conception pessimiste en ce qui concerne la possibilité de l’homme de sortir de la minorité : il peut être libéré, mais il y a encore des échecs, c’est un « saut mal assuré au dessus du fossé ».
Cependant, Kant termine le texte avec optimisme, parce qu’il croit qu’il y aura toujours quelqu’un capable d’utiliser sa raison, de se délivrer de sa « minorité ». On peut suppléer à la dépendance, on peut retrouver sa dignité qui réside dans l’usage de la raison. Les philosophes des Lumières connaissent déjà le plaisir de la libre réflexion, ils  représentent une sorte d’idéal ; donc « qu’est-ce que le Lumières ? » : sortir de la minorité grâce au courage et à la volonté de liberté.
Grâce à cette conclusion, la fonction didactique de ce texte est bien résumée par la phrase « sapere aude ! », qui se cache déjà dans l’incipit de l’exposé. L’optimisme conclusif est une invitation à se servir de l’entendement propre de chaque homme et à sortir de la minorité, en ayant le courage d’être libre.

                                                                                                                                                          Antonella Innocenzio





Le texte proposé, écrit en 1784 par Emmanuel Kant, s’ouvre par  une énonciation qui est à la fois la réponse au titre « Qu’est-ce que les Lumières ? » et constitue, en même temps, la thèse de son analyse : « les lumières, c’est pour l’homme sortir d’une minorité qui n’est imputable qu’à lui. »
Voilà comment Kant, dès la première ligne synthétise avec efficacité les Lumières, la portée révolutionnaire de ce mouvement et met en opposition la philosophie du XVIII siècle à la tradition philosophique européenne. Kant part de l’idée de « minorité », une condition d’ignorance et de paresse philosophique dans laquelle l’homme se trouve depuis le Moyen Age : selon le philosophe prussien les hommes n’ont jamais eu le courage et la volonté nécessaires pour se servir librement de leur pensée. Par paresse et par commodité ils ont suivi la « tutelle » de la philosophie d’Aristote ou de Platon, si l’on fait référence aux philosophes des siècles XVe et XVIe qui en reprennent des éléments, ou encore à la vision de l’univers, toujours dominée par la vision d’Aristote et de Tolomé.
Si Kant critique et désapprouve l’inactivité intellectuelle humaine, il n’en fait pas la seule fautive de cet état de minorité : l’auteur accuse aussi l’éducation scolastique et sa philosophie, en la considérant comme créatrice et continuatrice de « préceptes et formules » qui « sont les entraves de cet état de minorité ». Kant soutient donc la nécessité pour l’homme d’oser se servir librement de son intelligence : « Sapere aude ! » voilà ce que représentent les Lumières.
Bacon et Descartes, au XVII siècle, avaient déjà anticipé une « tabula rasa » des systèmes philosophiques classiques envers une nouvelle et libre recherche. La philosophie scolastique est en effet devenue une « seconde nature » qui empêche l’homme de penser librement, simplement parce que sa formation intellectuelle l’en rend incapable et quand bien même il arriverait à faire libre usage de son entendement, il serait perdu et désemparé.
Il existe cependant une différence entre les courants de pensées de Bacon et de Kant : alors que l’Anglais a comme but le contrôle de la nature à travers sa connaissance –l’on est encore dans une phase de pré-révolution scientifique- et bien que Descartes ait déjà commencé à élargir le rationalisme à tous les domaines du savoir, ce n’est qu’avec les Lumières que les sciences acquièrent leur caractère d’universalité. Cette idée est partagée par Voltaire qui dit qu’il ne faut pas « être dupe de tous les mensonges, de toutes les illusions auxquels l’homme se trouve exposé ».
Le XVIII siècle est donc le siècle des « combats » de nombreux savants pour l’universalité de la connaissance et de la liberté : en politique à travers Montesquieu et Voltaire, en économie avec Adam Smith ou Quesnay ou encore en droit avec, entre autres, Cesare Beccaria ; bref, la culture s’étend à tous les aspects du savoir jusqu’à son sommet, en 1751, avec la parution de l’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert.
Voilà comment Kant explique, par  cet article, cette révolution du savoir, cet éclairement culturel de l’obscurité de l’ignorance du passé -d’où le nom de Lumières- en invoquant la liberté, et, par ailleurs, toutes les libertés, comme le dit Daniel Roche : « l’avancée décisive consiste à admettre l’universalité de la liberté, à passer des libertés à la liberté . »
Et finalement Kant conclut en souhaitant la liberté de penser, qu’il définit comme la plus inoffensive, mais celle qui nous permet, en reprenant Pascal, de nous anoblir, de nous affirmer pleinement en tant qu’hommes, car, après tout, « toute notre  
dignité consiste en la pensée . »
                                                                                                                                                             David Leorati






Kant peut être considéré comme le philosophe qui a atteint l'apogée de l'époque des Lumières. Il écrit une série d'articles à propos de la philosophie des Lumières dont le plus important est “Qu'est-ce que les Lumières?” publié en 1784. Dans cet article, il affirme deux principes fondamentaux de la philosophie morale, c'est-à-dire la liberté et la raison critique. Ces deux principes sont liés par une relation à double sens: la liberté est la condition qui permet à l'homme d'utiliser sa raison, alors que la raison permet à l'homme d'exercer sa liberté. Kant donne, donc, un aperçu de la situation du XVIIIe d'un point de vue intellectuel, en affirmant, enfin, que l'homme,  s’il est libre, peur sortir de sa condition d'ignorance et passivité.

Dans la première partie du texte, Kant expose les deux conceptions de “majorité” et “minorité”: par ces deux mots il indique, respectivement, le progrès intellectuel, lié à l'utilisation de la raison critique, et, de l'autre coté, l'incapacité de l'homme “de se servir de son propre entendement”. Sa thèse est que l'homme, même s'il peut utiliser sa raison, ne se délivre pas de la tradition parce qu'il n'a pas de courage ni de volonté. Dans ce passage, il y a une critique évidente  à la philosophie scolastique, qui, même après la révolution scientifique du XVIIe, est encore acceptée et cause un arrêt du progrès intellectuel. Selon Kant, ce sont les Lumières qui, avec la promotion de la raison critique, constituent pour l'homme la possibilité de sortir de sa minorité, qui est une condition “commode” mais qui mortifie la raison humaine.

Dans la deuxième partie, l'auteur analyse le fait que l'homme, n'ayant jamais été habitué à l'utilisation de sa raison, a beaucoup de difficultés à dépasser sa condition de minorité. “Préceptes et formules”, c'est-à-dire les dogmes religieux et, dans le domaine politique, les régimes absolues, conduisent l'homme à une attitude de passivité: il y a donc beaucoup d'erreurs de jugement et beaucoup de préjugés dans la pensée de ceux qui essayent de se délivrer par la tradition. Il y a aussi peu de penseurs qui ont réussi, c'est-à-dire des philosophes des Lumières et des savants de la révolution scientifique.
Bien que  la situation soit  fort négative , dans la dernière partie du texte il émerge une vision optimiste: Kant manifeste sa confiance en l'homme, qui, s'il est laissé libre de s'exprimer, a une tendance naturelle à penser par soi-même.

En conclusion, c'est donc la liberté que les Lumières veulent réaliser, parce que la liberté est la condition préalable à l'usage de sa propre raison. Toutefois, cette liberté doit être aussi supportée par des qualités morales, parce qu'il est nécessaire d'avoir du courage pour affirmer l'indépendance de la raison critique. Le message des Lumières est donc “Sapere aude” (“ose savoir”), une devise qui jouera un r
ôle bien important  dans cette période du  XVIIIe siècle, caractérisée, surtout en France, par l'absolutisme au niveau politique, par le mercantilisme, expression qui souligne le manque de liberté, au niveau économique, et par la philosophie scolastique au niveau intellectuel.

                                                                                                                                                  
Laura Tripaldi