vendredi 29 août 2014

Charles Baudelaire : "L'Ennemi" et "Les Aveugles" - Lecture et commentaire de Jean-Michel Maulpoix










   Ma jeunesse ne fut qu'un ténébreux orage,
 Traversé çà et là par de brillants soleils ;
 Le tonnerre et la pluie ont fait un tel ravage,
 Qu'il reste en mon jardin bien peu de fruits vermeils.

5 Voilà que j'ai touché l'automne des idées,
 Et qu'il faut employer la pelle et les râteaux
 Pour rassembler à neuf les terres inondées,
 Où l'eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

 Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve
10 Trouveront dans ce sol lavé comme une grève
 Le mystique aliment qui ferait leur vigueur ?
   
 - Ô douleur ! ô douleur ! Le temps mange la vie,
 Et l'obscur Ennemi qui nous ronge le cour
 Du sang que nous perdons croît et se fortifie !










Contemple-les, mon âme; ils sont vraiment affreux !
Pareils aux mannequins; vaguement ridicules;
Terribles, singuliers comme somnambules;
Dardant on ne sait où leurs globes ténébreux.

Leurs yeux, d’où la divine étincelle est partie,
Comme s’ils regardaient au loin, restent levés,
Au ciel; on ne les voit jamais vers les pavés
Pencher rêveusement leur tête appesantie.

Ils traversent ainsi le noir illimité,
Ce frère du silence éternel. Ô cité !
Pendant qu'autour de nous tu chantes, ris & beugles,

Éprise du plaisir jusqu'à l'atrocité,
Vois, je me traîne außi ! mais, plus qu’eux hébété,
Je dis : Que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles ?




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