Guillaume Apollinaire
Automne malade
Automne malade et adoré
Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers
Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies
Quand il aura neigé
Dans les vergers
Pauvre automne 5
Meurs en blancheur et en richesse
De neige et de fruits mûrs
Au fond du ciel
Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines 10
Qui n'ont jamais aimé
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines 10
Qui n'ont jamais aimé
Aux lisières lointaines
Les cerfs ont bramé
Les cerfs ont bramé
Et que j'aime ô saison que j'aime tes rumeurs
Les fruits tombant sans qu'on les cueille 15
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les fruits tombant sans qu'on les cueille 15
Le vent et la forêt qui pleurent
Toutes leurs larmes en automne feuille à feuille
Les feuilles
Qu'on foule
Un train 20
Qui roule
La vie
S'écoule
La vie
S'écoule
Petite illustration de l'automne sur les quatre saisons de Vivaldi.
Alphonse de Lamartine
L'automne
Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !
Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire,
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !
Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire,
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !
Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits,
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !
Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encore, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui !
Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ;
L'air est si parfumé ! la lumière est si pure !
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !
Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel !
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de miel ?
Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...
La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ;
Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !
Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits,
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !
Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encore, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui !
Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ;
L'air est si parfumé ! la lumière est si pure !
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !
Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel !
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de miel ?
Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...
La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ;
Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.
Avec une analyse intéressante de ce poème
Charles Baudelaire
Chant d'automne
Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts!
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.
Tout l'hiver va rentrer dans mon être: colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.
J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
II me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui? - C'était hier l'été; voici l'automne!
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.IIJ'aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,
Douce beauté, mais tout aujourd'hui m'est amer,
Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l'âtre,
Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.
Et pourtant aimez-moi, tendre coeur! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant;
Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère
D'un glorieux automne ou d'un soleil couchant.
Courte tâche! La tombe attend - elle est avide!
Ah! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,
Goûter, en regrettant l'été blanc et torride,
De l'arrière-saison le rayon jaune et doux!
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts!
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.
Tout l'hiver va rentrer dans mon être: colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.
J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
II me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui? - C'était hier l'été; voici l'automne!
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.IIJ'aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,
Douce beauté, mais tout aujourd'hui m'est amer,
Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l'âtre,
Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.
Et pourtant aimez-moi, tendre coeur! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant;
Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère
D'un glorieux automne ou d'un soleil couchant.
Courte tâche! La tombe attend - elle est avide!
Ah! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,
Goûter, en regrettant l'été blanc et torride,
De l'arrière-saison le rayon jaune et doux!
Gustave Flaubert
Incipit de Novembre, 1842
J'aime l'automne, cette triste saison va bien aux souvenirs. Quand les arbres n'ont plus de feuilles, quand le ciel conserve encore au crépuscule la teinte rousse qui dore l'herbe fanée, il est doux de regarder s'éteindre tout ce qui naguère brûlait encore en vous.
Je viens de rentrer de ma promenade dans les prairies vides, au bord des fossés froids où les saules se mirent ; le vent faisait siffler leurs branches dépouillées, quelquefois il se taisait, et puis recommençait tout à coup ; alors les petites feuilles qui restent attachées aux broussailles tremblaient de nouveau, l'herbe frissonnait en se penchant sur terre, tout semblait devenir plus pâle et plus glacé ; à l'horizon le disque du soleil se perdait dans la couleur blanche du ciel, et le pénétrait alentour d'un peu de vie expirante. J'avais froid et presque peur.
Je me suis mis à l'abri derrière un monticule de gazon, le vent avait cessé. je ne sais pourquoi, comme j'étais là, assis par terre, ne pensant à rien et regardant au loin la fumée qui sortait des chaumes, ma vie entière s'est placée devant moi comme un fantôme, et l'amer parfum des jours qui ne sont plus m'est revenu avec l'odeur de l'herbe séchée et des bois morts ; mes pauvres années ont repassé devant moi, comme emportées par l'hiver dans une tourmente lamentable ; quelque chose de terrible les roulait dans mon souvenir, avec plus de furie que la brise ne faisait courir les feuilles dans les sentiers paisibles ; une ironie étrange les frôlait et les retournait pour mon spectacle, et puis toutes s'envolaient ensemble et se perdaient dans un ciel morne.
Elle est triste, la saison où nous sommes : on dirait que la vie va s'en aller avec le soleil, le frisson vous court dans le coeur comme sur la peau, tous les bruits s'éteignent, les horizons pâlissent, tout va dormir ou mourir. Je voyais tantôt les vaches rentrer, elles beuglaient en se tournant vers le couchant, le petit garçon qui les chassait devant lui avec une ronce grelottait sous ses habits de toile, elles glissaient sur la boue en redescendant la côte, et écrasaient quelques pommes restées dans l'herbe. Le soleil jetait un dernier adieu derrière les collines confondues, les lumières des maisons s'allumaient dans la vallée, et la lune, l'astre de la rosée, l'astre des pleurs, commençait à se découvrir dans les nuages et à montrer sa pâle figure.
J'ai savouré longuement ma vie perdue ; je me suis dit avec joie que ma jeunesse était passée, car c'est une joie de sentir le froid vous venir au coeur, et de pouvoir dire, le tâtant de la main comme un foyer qui fume encore : il ne brûle plus. J'ai repassé lentement dans toutes les choses de ma vie, idées, passions, jours d'emportement, jours de deuil, battements d'espoir, déchirements d'angoisse. J'ai tout revu, comme un homme qui visite les catacombes et qui regarde lentement, des deux côtés, des morts rangés après des morts. A compter les années cependant, il n'y a pas longtemps que je suis né, mais j'ai à moi des souvenirs nombreux dont je me sens accablé, comme le sont les vieillards de tous les jours qu'ils ont vécus ; il me semble quelquefois que j'ai duré pendant des siècles et que mon être renferme les débris de mille existences passées. Pourquoi cela ? Ai-je aimé ? ai-je haï ? ai-je cherché quelque chose ? j'en doute encore ; j'ai vécu en dehors de tout mouvement, de toute action, sans me remuer, ni pour la gloire, ni pour le plaisir, ni pour la science, ni pour l'argent.
Je viens de rentrer de ma promenade dans les prairies vides, au bord des fossés froids où les saules se mirent ; le vent faisait siffler leurs branches dépouillées, quelquefois il se taisait, et puis recommençait tout à coup ; alors les petites feuilles qui restent attachées aux broussailles tremblaient de nouveau, l'herbe frissonnait en se penchant sur terre, tout semblait devenir plus pâle et plus glacé ; à l'horizon le disque du soleil se perdait dans la couleur blanche du ciel, et le pénétrait alentour d'un peu de vie expirante. J'avais froid et presque peur.
Je me suis mis à l'abri derrière un monticule de gazon, le vent avait cessé. je ne sais pourquoi, comme j'étais là, assis par terre, ne pensant à rien et regardant au loin la fumée qui sortait des chaumes, ma vie entière s'est placée devant moi comme un fantôme, et l'amer parfum des jours qui ne sont plus m'est revenu avec l'odeur de l'herbe séchée et des bois morts ; mes pauvres années ont repassé devant moi, comme emportées par l'hiver dans une tourmente lamentable ; quelque chose de terrible les roulait dans mon souvenir, avec plus de furie que la brise ne faisait courir les feuilles dans les sentiers paisibles ; une ironie étrange les frôlait et les retournait pour mon spectacle, et puis toutes s'envolaient ensemble et se perdaient dans un ciel morne.
Elle est triste, la saison où nous sommes : on dirait que la vie va s'en aller avec le soleil, le frisson vous court dans le coeur comme sur la peau, tous les bruits s'éteignent, les horizons pâlissent, tout va dormir ou mourir. Je voyais tantôt les vaches rentrer, elles beuglaient en se tournant vers le couchant, le petit garçon qui les chassait devant lui avec une ronce grelottait sous ses habits de toile, elles glissaient sur la boue en redescendant la côte, et écrasaient quelques pommes restées dans l'herbe. Le soleil jetait un dernier adieu derrière les collines confondues, les lumières des maisons s'allumaient dans la vallée, et la lune, l'astre de la rosée, l'astre des pleurs, commençait à se découvrir dans les nuages et à montrer sa pâle figure.
J'ai savouré longuement ma vie perdue ; je me suis dit avec joie que ma jeunesse était passée, car c'est une joie de sentir le froid vous venir au coeur, et de pouvoir dire, le tâtant de la main comme un foyer qui fume encore : il ne brûle plus. J'ai repassé lentement dans toutes les choses de ma vie, idées, passions, jours d'emportement, jours de deuil, battements d'espoir, déchirements d'angoisse. J'ai tout revu, comme un homme qui visite les catacombes et qui regarde lentement, des deux côtés, des morts rangés après des morts. A compter les années cependant, il n'y a pas longtemps que je suis né, mais j'ai à moi des souvenirs nombreux dont je me sens accablé, comme le sont les vieillards de tous les jours qu'ils ont vécus ; il me semble quelquefois que j'ai duré pendant des siècles et que mon être renferme les débris de mille existences passées. Pourquoi cela ? Ai-je aimé ? ai-je haï ? ai-je cherché quelque chose ? j'en doute encore ; j'ai vécu en dehors de tout mouvement, de toute action, sans me remuer, ni pour la gloire, ni pour le plaisir, ni pour la science, ni pour l'argent.
Giovanni Pascoli
Novembre
Gemmea l'aria, il sole così chiaro
che tu ricerchi gli albicocchi in fiore,
e del prunalbo l'odorino amaro
senti nel cuore...
Ma secco è il pruno, e le stecchite piante
di nere trame segnano il sereno,
e vuoto il cielo, e cavo al piè sonante
sembra il terreno.
Silenzio, intorno: solo, alle ventate,
odi lontano, da giardini ed orti,
di foglie un cader fragile. E' l'estate
fredda, dei morti.
Gemmea l'aria, il sole così chiaro
che tu ricerchi gli albicocchi in fiore,
e del prunalbo l'odorino amaro
senti nel cuore...
Ma secco è il pruno, e le stecchite piante
di nere trame segnano il sereno,
e vuoto il cielo, e cavo al piè sonante
sembra il terreno.
Silenzio, intorno: solo, alle ventate,
odi lontano, da giardini ed orti,
di foglie un cader fragile. E' l'estate
fredda, dei morti.
Giuseppe Ungaretti
Soldati
Si sta come
d'autunno
sugli alberi
le foglie
d'autunno
sugli alberi
le foglie
Vincenzo Cardarelli
Ottobre
Un tempo, era d'estate,
era a quel fuoco, a quegli ardori,
che si destava la mia fantasia.
Inclino adesso all'autunno
dal colore che inebria;
amo la stanca stagione
che ha già vendemmiato.
Niente più mi somiglia,
nulla più mi consola,
di quest'aria che odora
di mosto e di vino
di questo vecchio sole ottobrino
che splende nelle vigne saccheggiate.
Sole d'autunno inatteso,
che splendi come in un di là,
con tenera perdizione
e vagabonda felicità,
tu ci trovi fiaccati,
vòlti al peggio e la morte nell'anima.
Ecco perché ci piaci,
vago sole superstite
che non sai dirci addio,
tornando ogni mattina
come un nuovo miracolo,
tanto più bello quanto più t'inoltri
e sei lì per spirare.
E di queste incredibili giornate
vai componendo la tua stagione
ch'è tutta una dolcissima agonia.
che splendi come in un di là,
con tenera perdizione
e vagabonda felicità,
tu ci trovi fiaccati,
vòlti al peggio e la morte nell'anima.
Ecco perché ci piaci,
vago sole superstite
che non sai dirci addio,
tornando ogni mattina
come un nuovo miracolo,
tanto più bello quanto più t'inoltri
e sei lì per spirare.
E di queste incredibili giornate
vai componendo la tua stagione
ch'è tutta una dolcissima agonia.
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