lundi 8 septembre 2014

L'épopée des Cathédrales (ARTE TV)









 Pour mes élèves de I D ESABAC ..pour continuer notre cours

  sur la naissance de l'art gothique.




 Chartres

Le nouveau chevet étant réuni au narthex (1)
L'église étincelle, éclairée en son vaisseau médian,
Car lumineux est ce qui joint en clarté deux sources de lumière.
L'oeuvre fameux resplendit de cette clarté nouvelle
L'agrandissement fut réalisé de nos jours
C'est moi, Suger, qui a dirigé les travaux.
1)ARCHIT. CHRÉT. Portique élevé en avant de la nef, dans les anciennes basiliques et où se tenaient les catéchumènes, les énergumènes et les pénitents auditeurs qui devaient être isolés de l'ensemble des fidèles.  
La Geste de Louis IV par Suger



L'Epopée des Cathédrales


Le Moyen Age n’a pas toujours été la période obscure que l’on croit. Les 11° et 12° siècles comptent au contraire parmi les siècles les plus lumineux de notre histoire.
Nous avons aussi pour habitude de considérer le moyen âge comme l’époque de la lenteur. Rien de plus faux pour les années 1150-1250. En deux siècles seulement, les 12° et 13° siècles, les sujets du roi de France se mettent à ériger pas moins de 80 cathédrales.Très rapidement la mode gothique gagnera toute l’Europe.
L’ inventivité technique qu’a nécessité l’érection de monuments aussi grand est comparable à celle qui a prévalu après la découverte de l’électricité à la fin du 18°, après l’invention du béton au 19° ou du transistor au 20°.
La construction des cathédrales gothiques a été une extraordinaire aventure architecturale, financière et humaine. 
Notre esprit de compétition vient en partie de là. 
A partir des années 1250 une frénésie de la construction embrase la région la plus riche d’occident : l’Ile de France. Chaque ville voulait avoir sa cathédrale et une cathédrale plus haute, plus belle que celle de la ville voisine. 
Entre les inventeurs du gothique une course aux records s’engage, une course effrénée, émaillée d’accidents et de catastrophes . Evêques, chanoines et bourgeois sont animés par un esprit record du monde, tout comme les New-yorkais avec leurs gratte-ciel.
Pourquoi cette folie des grandeurs ? Son origine n’est-elle que spirituelle, due à un renouveau de la foi ? N’est-elle pas due aussi à la libération de l’esprit d’entreprise dans des villes en plein essor, à l’audace d’une poignée de maîtres d’œuvre et d’architectes ?
Comment ces monuments ont-ils été édifiées ? Comment travaillaient les ouvriers ? Quelle était la vie du chantier ? Techniquement, dans l’art de la pierre, on a jamais fait mieux depuis..
LE TRIOMPHE DE LA CHRETIENTE, DES CLERCS ET DE LA BOURGEOISIE.
Près de deux siècles d’années noires avant l’an mil (guerres féodales, invasions, disette famines, épidémies) avaient mis les hommes à genoux. Après l’an mil la nouvelle dynastie des capétiens ramène la paix et une stabilité qui ouvre une période de renouveau mise à profit par l’Eglise.
Renouveau de la foi et triomphe de la chrétienté.A la fin du 11° deux évènements majeurs vont changer la face du monde et permettre l’éclosion de l’ère des cathédrales : la réforme du pape Grégoire VII et les croisades.
Les croisades visent à la reconquête des lieux saints
. Au départ c’est un grand élan de foi. On prend conscience que les lieux où Jésus a vécu sont aux mains des Musulmans. Rois, seigneurs et chevaliers partent en croisade. Au lieu de se battre entre eux, les princes chrétiens vont se battre contre ceux qu’on appelait les infidèles. Les croisades éloignent les seigneurs. Ils reviennent souvent ruinés. Les croisades ont permis aux bourgeois des villes de s’emparer du devant de la scène. Or les cathédrales sont un phénomène purement urbain.
Les reliques ramenées de Terre Sainte serviront à lever des fonds pour édifier les cathédrales.
Essor des villes et triomphe de l’évêque. 
La cathédrale est par définition l’église de l’évêque. Or à cette époque de croissance des villes les évêques retrouvent une autorité qu’ils avaient perdue au profit des abbayes des campagnes.Les clercs s’étaient repliés dans les monastères pour échapper à l’emprise du pouvoir royal. Au 11° siècle l’église était soumise au roi ; c’était le roi qui nommait les évêques. Voici qu’un pape, Grégoire VII, impose une réforme qui va être un tournant dans l'histoire de l'église et de l'occident médiéval. Il affirme la supériorité du pouvoir spirituel sur le pouvoir temporel et il considère qu'il est le seul habilité à nommer les évêques.Dans les villes les évêques redeviennent la véritable autorité. Plusieurs conciles vont se préoccuper de rassembler les fidèles autour d’eux. Ils définissent la pratique des sacrements et les obligations des fidèles ; ils instaurent la supériorité du droit canon sur la coutume, ils imposent l'idée que seule l'église peut guider vers le salut éternel. 
Pour mieux animer – et contrôler - la communauté des citadins et non des seuls paroissiens, la petite église romane ne suffit plus. Dieu ne peut pas habiter dans un temple étriqué. Il ne peut être que grandiose, parfait, riche et merveilleux, une Jérusalem céleste, un reflet de la demeure du Très Haut, ouvert au plus grand nombre. Telle est l’idée fondatrice qui lancera le mouvement des cathédrales.
Interview avec le réalisateur Jean-François Delassus
Cathédrales
Les gratte-ciels du Moyen-Âge
La construction des cathédrales fut une véritable épopée, au même titre que les pyramides d'Égypte. Jean-François Delassus revient sur le tournage de Cathédrales,réalisé comme un reportage au pays des bâtisseurs.
"Tout a commencé en Ile de France qui est alors la région la plus riche de l’Occident. Le département de l’Oise était le Manhattan de l’époque !"
"Dans les cathédrales, tout le monde se côtoyait, les seigneurs comme les manants. C'était comme une maison du peuple, ouverte à tous. Un lieu vivant, pas seulement un lieu de prières. On y parlait à voix haute, contrairement à aujourd’hui où l’on chuchote…" (Jean-François Delassus)
Comment vous y êtes-vous pris pour raconter la construction des cathédrales ? Que peut-on montrer lorsqu’on ne dispose pas d’images d’archives ?
J’espère avoir résolu ce problème grâce au principe des évocations vivantes — je préfère ce terme à celui de "reconstitution". Pour moi, il s’agit de plonger le spectateur dans ce qu’était l’ambiance de l’époque. Et ceci de la façon la plus exacte possible. Cela permet également de faire comprendre certaines techniques, je pense notamment à la roue écureuil, pour élever des pierres lourdes sur les hauteurs du bâtiment. L’une d’entre elles étant toujours en état, j’ai placé deux personnes dedans et on l’a mise en mouvement. Du coup on en saisit instantanément le fonctionnement. C’est tout de même plus parlant que de filmer des gravures d’époques !
Avez-vous fait appel à des associations de médiévistes pour ces évocations ?
J’ai profité de certaines fêtes où les associations de médiévistes sont assez actives, notamment à Compiègne, Laon et Beauvais. En France, beaucoup de gens s’intéressent au Moyen-Âge ; certains parcourent la France entière pour participer à des fêtes médiévales. À Beauvais, c’est toute une partie de la ville qui se déguise ; les participants disposent de près de 2 000 costumes. J’ai repéré quelques personnes et leur ai demandé d’improviser… Je trouve que plutôt que de dire, il vaut mieux montrer. J'ai voulu être "grand public" tout en étant irréprochable d’un point de vue historique. J’ai voulu faire un documentaire qui réponde aux questions que les gens se posent en visitant les cathédrales. Ou qu’ils n’ont pas pensé à se poser. L'essentiel était de ne pas être rébarbatif, de faire comprendre visuellement les choses. À la limite, on peut presque se passer du commentaire, contrairement aux documentaires classiques qui font souvent cours d’école…
Avez-vous été confronté à des difficultés particulières ?
Bien entendu, cela n’a pas toujours été simple. Ce n'est pas facile de rendre sur un écran de télévision ce qu’est une cathédrale : il faut que les images soient particulièrement soignées, filmer avec de bonnes lumières. Et puis on a tourné des plans vertigineux, qui n’avait jamais été faits : il fallait pendre la caméra dans le vide pour filmer des vitraux à mi-hauteur, la faire pivoter… On a aussi beaucoup crapahuté : plusieurs centaines de marches avec le matériel pour monter en haut de cathédrales qui atteignent parfois 70 mètres de hauteur. Excepté quelques séquences tournées plan par plan, on a filmé comme pour un reportage. C’est pour ça que les gens sont naturels. Le résultat est tout à fait représentatif de ce qu’était la vie de l'époque. Dans les cathédrales, tout le monde se côtoyait, les seigneurs comme les manants. C'était une sorte de maison du peuple, ouverte à tous. Un lieu vivant, pas seulement un lieu de prière. On y parlait à voix haute, contrairement à aujourd’hui où l’on chuchote…
Contrairement à la légende, les bâtisseurs de cathédrales étaient plutôt bien traités…
Absolument. C’étaient des ouvriers spécialisés, bien payésÀ Paris, pour Notre-Dame, ils avaient la semaine de quatre jours ! Mais ce que j’ai trouvé particulièrement amusant à raconter, c’est la compétition qui a opposé les villes, chacune voulant une cathédrale plus belle que sa voisine. Ce fut une course à la hauteur. Du coup, on mettait rapidement au point des procédés permettant de monter de plus en plus haut. C’est aussi comme cela qu’est né l’art architectural gothique. Une surenchère qui a d’ailleurs conduit à quelques catastrophes puisque des cathédrales se sont carrément effondrées. Des voûtes ont cédé, des piliers n’ont pas tenu… Il faut comprendre qu’ils expérimentaient. Finalement, on a construit en France 80 cathédrales en 200 ans : c’est énorme ! Cette mode s’est répandue un peu partout en Europe, mais tout a commencé en Ile de France qui est alors la région la plus riche de l’Occident. Le département de l’Oise était le Manhattan de l’époque ! C’était un esprit record du monde ; chacun mettait la main au gousset, un peu comme aujourd’hui dans certains pays en voie de développement : on construit des mosquées colossales, financées uniquement par les gens et non par l’État. Comme pour les cathédrales puisque le roi ne participait pas au financement…
Vous utilisez des maquettes pour mieux expliquer l’architecture gothique…
C’est le meilleur moyen de bien en saisir les particularités. Dans l’architecture romane, plus vous montez haut plus il faut grossir les murs. Certaines églises romanes ont des murs qui à la base font plus de deux mètres de large, soutenus pas des contreforts. Les murs étant porteurs, cela ne favorise guère les ouvertures, d’où l’obscurité à l’intérieur.La technique est radicalement différente avec l’architecture gothique : elle permet d’élever des bâtiments à 80 mètre de hauteur, avec des vitraux s’étalant parfois sur 90 % de la surface des murs ! Ce sont les gratte-ciels de l’époque. Et le tout est souple, une condition obligatoire étant donné la formidable prise au vent qu’elles constituent. Si elles n’avaient pas été élastiques, aucune d’entre elles n’auraient résisté. C’est quand même merveilleux d’avoir à ce point maîtrisé la pierre il y a 800 ans…
Propos recueillis par Marc Belepois




















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