lundi 8 décembre 2014

Henri Atlan, douteur ès sciences





 « On n’a pas de mérite à être intelligent. 

On a compris, c’est tout.

Et, quand ça amuse, c’est encore mieux »




LE MONDE DES LIVRES | 

"La seule chose importante est de justifier 

nos doutes, de déterminer quand 

il convient de douter"


«Farfelu » est un adjectif qu’il affectionne. Est « farfelu », pour Henri Atlan, ce qui s’oppose au juste ou au raisonnable. Moins méchant qu’« inepte » ou « crétin », le qualificatif possède le petit éclat d’ironie qu’on retrouve dans son regard moqueur mais toujours bienveillant. D’ailleurs, après plus d’une heure autour d’un café, on a tellement souri qu’on est perplexe : vraiment, tout l’amuse ? « Un peu, oui… Sauf les choses tristes. » Il a passé l’été à Jérusalem, pendant l’opération « Bordure protectrice », voilà une des choses tristes dont il ne veut plus parler. Pour le reste, ce médecin, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (Ehess), professeur émérite de biophysique, semble pratiquer cet « acquiescement, aussi joyeux que possible, au monde » que recommande le philosophe dont il se sent le plus proche, et dont il est devenu l’un des meilleurs spécialistes, Spinoza.

Les deux LSD


Henri Atlan partage maintenant sa vie entre Jérusalem et Paris. On peut, sans se tromper, le présenter comme biologiste ou spécialiste en modèles informatiques : ce remarquable chercheur est l’un des fondateurs de l’auto-organisation, un nouveau modèle d’interprétation du vivant développé dans les années 1970. Mais on risquerait d’oublier qu’il est tout autant philosophe, lecteur de la kabbale et du Talmud, de Platon et de Spinoza, comme l’atteste chaque page de son grand œuvre, les deux tomes des Etincelles de hasard (Seuil, 1999 et 2003). Ce parcours intellectuel entre recherche, humanités classiques et textes sacrés le classe un peu à part en France, où sciences, philosophie et religion ont coutume de s’ignorer autant qu’elles peuvent.

Le livre qui paraît cet automne, Croyances. Comment expliquer le monde ?, se trouve sans surprise au croisement de ces trois domaines de prédilection. C’est l’occasion, dit-il, de reprendre de vieilles interrogations qu’il « traîne » depuis longtemps. La conversation nous emmène en effet dans les années 1960. Le jeune chercheur, intégré dans un laboratoire de San Francisco, n’est alors pas insensible à l’ambiance hippie qui règne sur les campus de la Côte ouest. Il n’ignore bientôt plus rien des deux LSD : ni de laLogic of Scientific Discovery (1934), un classique du philosophe des sciences Karl Popper, fort convenable lecture pour un étudiant, ni… de l’autre. C’est le souvenir de ces expériences qui lui revient à la lecture de la biographie du chaman d’Amazonie Davi Kopenawa (La Chute du ciel, de Bruce Albert, Plon, 2010). Que donc penser de ces croyances liées à un état modifié de conscience ? « Jamais je n’ai eu l’idée qu’il n’y a de connaissances valables que dans les sciences », se rappelle-t-il. D’ailleurs, « s’il y a une différence entre la croyance et le savoir, elle n’est pas si tranchée ».
On retrouve bien là l’homme qui s’est toujours méfié, dans sa pratique de chercheur comme de philosophe, de ce qui est trop net, trop définitif. De la métaphore du « programme » génétique, par exemple. Ou encore de l’opposition entre liberté et déterminisme. Le clivage entre science et croyance lui inspire le même genre de méfiance. Trop facile et sans doute trop paresseux. Voyons, par exemple : on ne sait pas trop ce qu’est le qi, cette énergie intérieure décrite par la médecine chinoise, mais, il l’ajoute dans un sourire presque narquois, « manifestement, c’est quelque chose ! » ; quelque chose qu’on ne peut simplement pas mesurer ou décrire avec les instruments de la science moderne. Prudence : « Cela ne veut pas dire que je suis relativiste. Toutes les croyances ne se valent pas. »

Les croyances ? « Nous ne faisons qu’en hériter »
Mais alors ? Comment faire si les frontières entre savoir et superstition ne sont pas étanches ? Où porter notre confiance ? Fausse piste, s’entend-on répondre. Car cela supposerait que nous choisissions nos croyances : « Or, nous ne faisons qu’en hériter, et d’un tas ! La seule chose importante est de justifier nos doutes, de déterminer quand il convient de douter. » Il faut tout reprendre à l’envers. Oserait-on dire qu’on a l’habitude, avec Henri Atlan ? Il y a presque dix ans, il eut l’idée de faire progresser la réflexion bioéthique sur la dissociation entre sexualité et procréation en annonçant, non sans ­facétie, que d’ici quelques années un utérus artificiel serait techniquement au point… Le livre (L’Utérus artificiel, Seuil, 2005) et l’hypothèse avaient fait couler beaucoup d’encre.
« Je crois qu’il n’y a qu’une seule chose de tranchée entre le sot et l’homme avisé, ajoute l’alerte ­octogénaire, c’est le repos de l’esprit. Wittgenstein parle de la certitude comme d’un repos presque animal. » Ainsi le fanatisme n’est qu’une manière d’éviter de penser et il faut se réjouir de l’inconfort intellectuel que suscite en nous la présence de plusieurs croyances. Ce sentiment d’incohérence qui souvent nous tracasse serait la preuve du mouvement de notre esprit, le ­signe que nous ne sommes pas (complètement) des imbéciles ! Du reste, le monde des expériences intimes, existentielles, a toujours coexisté avec celui des expériences pratiques et sociales, sans qu’il faille forcément les opposer.
Est-il, lui aussi, un de ces chercheurs qui pratiquent et la science et la foi ? Non, pourtant. « Je suis né dans une famille juive non pratiquante, à Blida, en Algérie. On parlait de temps en temps de Dieu et j’ai hérité de ça, mais, sous l’effet de mon parcours scientifique, ça s’est transformé en objet d’études… » Un objet de réflexion pour le scientifique et pour le philosophe. Après la Faculté de médecine à Paris, commencée en 1948, et une pratique de cabinet (ainsi que de médecin de campagne en France et au Sénégal), Henri Atlan a suivi un cursus de biologie. Un parcours brillant. « On n’a pas de mérite à être intelligent. On a compris, c’est tout. Et, quand ça amuse, c’est encore mieux », ajoute-t-il. Décidément. En philo­sophie, il est un autodidacte complet. Il doit énormément, tient-il à dire, à Dina Dreyfus, professeure de philosophie, première épouse de Claude Lévi-Strauss, qui l’a guidé dans ses premières lectures.

Discours sceptique
Tout à son plaisir d’accueillir des idées qui dérangent ou d’épingler les certitudes, Henri Atlan a fait part à plusieurs reprises de ses doutes sur les modèles qui prédisent un réchauffement du climat.« Je ne crois en aucun catastrophisme. Des catastrophes sont possibles, mais pas celles qu’on croit. » Là encore, aucune contestation du savoir scientifique en tant que tel : c’est au nom de la connaissance qu’il possède dans ce domaine de la modélisation qu’il justifie ce discours sceptique. Mais croit-il au progrès ? « Bien sûr », si l’on admet qu’il n’est ni entièrement bon ni entièrement mauvais. « L’arbre de la connaissance ne portait pas sur ses rameaux le Bien et le Mal, mais, si l’on traduit mieux, laconnaissance bonne et la connaissance mauvaise. A chaque nouveau savoir nous devons nous demander s’il est bon pour nous et pour les autres. » C’est exactement ce à quoi il s’est employé quand il était membre du Comité consultatif national d’éthique, de 1983 à 2000.
Avant de se quitter, on fait part d’un dernier étonnement : de la physique fondamentale aux expériences mystiques d’un chaman amazonien, en passant par le bouddhisme, tout semble avoir une chance de l’intéresser et même de se voir accorder du crédit. « Ma femme, psychanalyste, me dit que je ne crois en rien et je lui dis que je crois en tout. Mais pas de la même façon… » Un exemple ? « Dans le domaine de la santé, je ne crois pas aux explications données parleurs prétendus spécialistes, mais je crois en toutes les médecines traditionnelles. Quand ça marche. » ­Réfléchissez bien : c’est très sérieux.


dimanche 7 décembre 2014

Noir désir: Gagnants / Perdants (Bonne nuit les petits)





Castagnola (cz)


je dois avouer qu'il m'est difficile de publier les chansons

de Bertrand Cantat après l'acte, d'une  violence   inouïe,  

qui l'a conduit  au  meutre de Marie Trintignant:

aucune excuse n'est admissible ...


Mais, cette magnifique chanson  qui est un hymne

de réaction et d'opposition  aux malheurs du temps ...

m'a   aussi rappelé avec Bonne nuit les petits Carosello








 
et les beaux jours


"des verts paradis des amours enfantines"...


mon enfance à Castagnola ..


période heureuse , s'il y en a...




Tous ces beaux jeux inventés
Pour passer devant les premiers
Pour que chacun soit écrasé
S’il refuse encore de plier
Les dégâts, les excès
Ils vont vous les faire payer
Les cendres qui resteront
C’est pas eux qui les ramasseront
Mais les esclaves et les cons
Qui n’auront pas su dire non
Nous on n’veut pas être des gagnants
Mais on acceptera jamais d’être des perdants.

Pimprenelle et Nicolas
Vous nous endormez comme ça
Le marchand de sable est passé
Nous on garde un œil éveillé
O la peur, ô le vide
O la victoire des avides
Faut pas bouger une oreille
Toutes sortes de chiens nous surveillent
Pas un geste, une esquisse
Sinon on tourne la vis
Nous on n’a rien à gagner
Mais on ne peut plus perdre puisque c’est déjà fait.

Toi qui viens de loin d’ici
Avec ta peau et tes os
On t’a parlé du paradis
On t’a menti, tout est faux
O mon ami ô mon frère tout ce nerf
Perdu pour la guerre
Tu vas voir tout l’amour
Qui traîne au fond des discours
Dis t’en veux des papiers ?
Dis tu l’as vu mon palais ?
T’auras rien, c’est ainsi
C’est pas fait pour les perdants, le paradis.

Il y a la chair à canon
Il y a la chair à spéculation
Il y a la chair à publicité
Enfin y'a tout ce que vous aimez
Vous et moi on le sait
Le spectacle est terminé
Pourtant c’était presque idéal
C’était loin du féodal
Oh maint’nant c’est foutu
Ça fait joli dans ton...
Fort intérieur c’est gênant
De rejoindre comme ça la cohorte des perdants.

Il faut pas se faire d’illusions
Mais c’est mieux debout pour l’action
Et pour nos âmes, c’est égal
Dieu n’est pas dans la bataille
O messieurs les décideurs
De toutes parts, de tous côtés
Sachez que profond dans nos cœurs
On n’arrête pas le progrès
Sous l’Iris, sous la peau
Sous les ongles et dans l’étau
On pourra toujours refuser
De devenir les premiers ou les derniers.

Pas de leaders triomphants
On s’ra jamais des gagnants ni des perdants.




vendredi 5 décembre 2014

Rome 4 décembre 2014 : Le Goncourt des lycéens ESABAC a couronné "Charlotte" de Foenkinos







Après le Renaudot et  le Goncourt des Lycéens français, 



remporte aussi le Goncourt des lycéens italiens

avec 

Charlotte






Magnifique journée 

de rencontres et de retrouvailles 

ce séminaire pour la remise  du 

Goncourt des lycéens italiens !!!





Entre 




et avec ma collègue Carla Griseri




Alice Lanzo et Giovanni Fraschini


Au travail  avec 




"Un bon livre vous explique ce qui vous arrive"

















mercredi 3 décembre 2014

Quand tu s'ras vieux Papa - Jehan Jonas











Quand tu s'ras vieux, papa
Au lieu de te r'fourguer à l'asile
Comme le font d'autres imbéciles
J' te foutrai chez les contractuels
Au service des intellectuels
Et par des bouts de papiers gras
Sur des gens que tu n' connaîtras pas
Tu dégueuleras la rancœur
D'une vie qui ne fut pas des meilleures
Quand tu s'ras vieux, papa

T'auras du temps
Et de l'argent
Pour t'envoyer
Des fleurs fanées
Qui s'effeuilleront
Pour pas un rond

Quand tu s'ras vieux, papa
Tu t' souviendras des jeunes voyous
Dont j'étais quand je vivais chez nous
Et tu te vengeras de n'être plus
Si jeune que tu l'aurais voulu
Tu verras les satisfactions
Qu'on tire d'emmerder les couillons
Et jusqu'à la dernière rose
Tu serviras à quelque chose
Quand tu s'ras vieux, papa

T'auras du temps
Et de l'argent
Pour faire le beau
Loin des autos
Aux frais de l'État
Trois fois par mois

Quand tu s'ras vieux, papa
T'iras glander comme ces vieillards
Qu'on voit tapiner aux trottoirs
Au profit d'un mac tout puissant
Qui se paye sur la peau des gens
Puis pour gagner ton dernier pieu
J' te couvrirai de papiers bleus
Et je mettrai sur le trou comblé
Un disque pour l'éternité
Quand tu s'ras mort, papa

J'aurai du temps
Mais pas d'argent
Pour te porter
Des fleurs fanées
Tu vois, papa
J' t'oublierai pas

Mais sur la pierre je ferai graver
Ci-gît un contractuel décontracté









mardi 2 décembre 2014

Remise des diplômes ESABAC à Busto Arsizio au lycée "CRESPI" pour les lycéens de la Lombardie



Voici 





CARLOTTA, ELENA,

 FRANCESCA, REBECCA

 SARA, SILVIA

du "Liceo Classico E. Cairoli"

 de Varese, 

avec 


qui étaient là pour la remise des diplômes ESABAC 




MERCI 

à elles et  à tous mes anciens élèves

 qui n'ont pas pu participer


ALICE, ANDREA, ANDREA, ANTONIO, 

BARBARA, CAROLA, COSTANZA, FEDERICA,

 GIACOMO, GIUDITTA, GIULIA, LUCIA,

 MARGHERITA, MARTINA,  MICHELE, SELENE.


Maintenant ...


C'est à vous  !!!

Aujourd'hui, c'est déjà 

Demain !!!







lundi 1 décembre 2014

Essai bref : "Guerre à la guerre : La poésie est une arme chargée de futur"









L'idée de cet essai m'est venue en lisant ce beau recueil 
de poèmes



Guerre à la guerre
une anthologie établie et présentée par Bruno Doucey

Editions Bruno Doucey


"J'ai 10 ans. La petite ville de province où se déroule 
mon enfanceest calme.  On y parle de la guerre au passé. 
Elle est l'affaire de mes grands-parents qui ont 
connu la Seconde Guerre mondiale , de mes 
arrière-grands-parents qui ont fait la Grande Guerre."

Avec quelques petites modifications j'épouse cette introduction ...

"J'ai 10 ans. Le petit village de province où se déroule
 mon enfance est calme.  On y parle de la guerre au passé.
 Elle est l'affaire de mes parents qui ont connu la
 Seconde Guerre mondiale, de mes grands-parents
 qui ont fait la Grande Guerre."


... mais la guerre est toujours là,
...
sans interrompre son ballet mortifère







"Dans quelques heures,
je ne serai plus de ce monde.
Nous allons être fusillés
 cet après-midi, à quinze heures"

Missak Manouchian



Les fusillés de Châteaubriant

Ils sont appuyés contre le ciel
Ils sont une trentaine appuyés contre le ciel,
Avec toute la vie derrière eux
Ils sont pleins d’étonnement pour leur épaule
Qui est un monument d’amour
Ils n’ont pas de recommandation à se faire
Parce qu’ils ne se quitteront jamais plus
L’un d’eux pense à un petit village
Où il allait à l’école
Un autre est assis à sa table
Et ses amis tiennent ses mains
Ils ne sont déjà plus du pays dont ils rêvent
Ils sont bien au dessus de ces hommes
Qui les regardent mourir
Il y a entre eux la différence du martyre
Parce que le vent est passé là où ils chantent
Et leur seul regret est que ceux
Qui vont les tuer n’entendent pas
Le bruit énorme des paroles
Ils sont exacts au rendez-vous
Ils sont même en avance sur les autres
Pourtant ils disent qu’ils ne sont plus des apôtres
Et que tout est simple
Et que la mort surtout est une chose simple
Puisque toute liberté se survit.


René Guy Cadou



Se questo è un uomo


Voi che vivete sicuri
Nelle vostre tiepide case,
voi che trovate tornando a sera
Il cibo caldo e visi amici:
Considerate se questo è un uomo
Che lavora nel fango
Che non conosce pace
Che lotta per un pezzo di pane
Che muore per un sì o per un no.
Considerate se questa è una donna,
Senza capelli e senza nome
Senza più forza di ricordare
Vuoti gli occhi e freddo il grembo
Come una rana d'inverno.
Meditate che questo è stato:
Vi comando queste parole.
Scolpitele nel vostro cuore
Stando in casa andando per via,
Coricandovi alzandovi;
Ripetetele ai vostri figli.
O vi si sfaccia la casa,
La malattia vi impedisca,
I vostri nati torcano il viso da voi.

 Primo Levi 



LA GUERRA CHE VERRA'

La guerra che verrà non è la prima,
prima ci sono state altre guerre.
Alla fine dell’ultima
c’eran vincitori e c’eran vinti.

La guerra che verrà non è la prima,
prima ci sono state altre guerre.
Alla fine dell’ultima guerra
c’eran vincitori e c’eran vinti.

Tra i vinti
la povera gente
faceva la fame.
Tra i vincitori
faceva la fame
la povera gente egualmente,
la povera gente egualmente.

La guerra che verrà
non è la prima…


Bertold Brecht



Mon général, votre tank est puissant
Il couche une forêt, il écrase cent hommes.
Mais il a un défaut :

il a besoin d’un conducteur.
Mon général, puissant est votre bombardier,
Plus vite que l’ouragan, plus fort que l’éléphant
Mais il a un défaut :
Il lui faut un mécanicien.

Mon général on peut tirer beaucoup de l’homme
Il sait voler, il sait tuer.
Mais il a un défaut :
Il sait pense



Bertold Brecht




IL EST PAISIBLE,  MOI AUSSI

Il est paisible, moi aussi.
Il sirote un thé citron
je bois un café,
c’est ce qui nous distingue.
Comme moi, il est vêtu d’une chemise rayée
trop grande.
Comme lui, je parcours les journaux du soir.
Il ne me surprend pas quand je l’observe de biais.
Je ne le surprends pas quand il m’observe de biais.
Il est paisible, moi aussi.
Il parle au serveur.
Je parle au serveur…
Un chat noir passe entre nous.
Je caresse la fourrure de sa nuit,
il caresse la fourrure de sa nuit…
Je ne lui dis pas : le ciel est limpide aujourd’hui,
plus bleu.
Il ne me dit pas : le ciel est limpide aujourd’hui.
Il est vu et il voit.
Je suis vu et je vois.
Je déplace la jambe gauche,
il déplace la jambe droite.
Je fredonne une chanson,
il fredonne un air proche.
Je me dis :
Est-il le miroir dans lequel je me vois ?

Puis je cherche son regard,
mais il n’est plus là…
Je quitte précipitamment le café,
et je me dis : c’est peut-être un assassin
ou peut-être un passant qui m’a pris
pour un assassin.


Il a peur, moi aussi







Rimbaud Atrthur "Le dormeur du val"


 Boris Vian à la Bibliothèque Nationale de France ...