mercredi 26 septembre 2018

Géricault Théodore : Le Radeau de la Méduse






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En juin 1816, La Méduse amirale, frégate de quarante-quatre canons, quitte l’île d’Aix sous les ordres du comte de Chaumareix, un émigré qui ne navigue plus depuis des années. À son bord, le gouverneur Schmaltz, envoyé par Louis XVIII pour reprendre le Sénégal, restitué à la France par l’Angleterre après le traité de Vienne de 1815.

Mal dirigée, elle s’échoue le 2 juillet sur le banc d’Arguin, au nord du cap Blanc, dans l’océan Atlantique. Le commandant abandonne à leur sort cent cinquante des quatre cents hommes de l’équipage. Sans rames, munis de biscuit trempé et de vin pour seuls vivres, ils prennent place sur un radeau de fortune (20 m × 7 m), halé par les canots de sauvetage, sous la responsabilité de l’aspirant Coudin. Les amarres se rompent. Les naufragés meurent noyés ou, ivres et pris de désespoir et de folie, s’entre-tuent, mangent les cadavres, se massacrent entre eux. L’horreur s’accroît chaque jour. Quand le brick l’Argus vient les secourir, seuls dix hommes pourront être réanimés.

Le comte de Chaumareix comparaît devant le Conseil de guerre à Paris. L’opinion libérale ne pardonne pas au gouvernement complaisant du roi de l’avoir réemployé. Deux survivants, le chirurgien Savigny et l’ingénieur Corréard, publient une relation qui défraye la chronique. La France est horrifiée. En 1817, alors que la volonté de silence allait faire son œuvre, Géricault rencontre les rescapés, accusés par la presse royaliste d’anthropophagie. Il décide de défendre leur cause.


















Un radeau sur une mer agitée. Des corps dénudés, maltraités, torturés.

   Un mouvement qui rassemble la majeure partie des naufragés : tous s’entassent, se pressent les uns contre les autres, laissant surgir au sommet un unique homme noir, de dos, agitant un tissu rouge et blanc. Les visages, les regards, les gestes, sont tendus vers l’horizon, vers ce minuscule point que l’on distingue à peine, mais qui pourtant symbolise l’espoir.

   Au-delà de ce mouvement, d’autres corps gisent, en marge. Des corps abandonnés, pris dans le sommeil de la mort. Les vivants s’appuient sur eux pour bâtir leur mouvement d’espoir ; ils sont ce qui leur est indispensable pour continuer à vivre. Parmi les morts, un homme âgé, au regard hagard, perdu dans des pensées morbides, dans ses souvenirs communs avec le jeune homme qu’il tient dans ses bras. Le cadavre de ce jeune homme à l’identité floue, qui pourrait tout aussi bien être son fils que son amant, ne doit pas disparaître dans les flots ; le vieil homme ne veux pas laisser s’enfuir la dernière preuve tangible de son existence. Les autres corps, étendus autour du duo, sont laissés à l’abandon, la tête plongée dans l’eau pour l’un, les traits marqués par la terreur et la douleur pour l’autre : plus personne ne fait attention à eux.

   L’espoir des personnages est celui de ceux qui ont peur de mourir: leur vie ne tient plus qu’à un fils. Les planches sur lesquelles ils se tiennent se détachent au grès des courants marins, créant des pièges fourbes dans lesquels il est facile d’y perdre une jambe ou d’y sombrer entièrement. Et sur cet amas de bois et de cordes, la voile sur laquelle ils semblaient compter est gonflée par les vents, mais rien n’y fait, elle est trop petite et inutile sans gouvernail.



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