Aube
J’ai embrassé l’aube d’été.
Rien ne bougeait encore au front des palais. L’eau
était morte. Les camps d’ombres ne quittaient pas la route
du bois. J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les
pierreries regardèrent, et les ailes
se levèrent sans bruit.
La première entreprise fut, dans le sentier déjà empli
de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.
Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers
les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse.
Alors je levai un à un les voiles. Dans l’allée, en
agitant les bras. Par la plaine, où je l’ai dénoncée au coq.
A la grand’ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme
un mendiant sur les quais de marbre,
je la chassais.
En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je
l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu
son immense corps. L’aube et l’enfant tombèrent au bas du bois.
Au réveil il était midi.
Arthur Rimbaud, Illuminations
A
l'aube
Brûlé
par l'énorme lumière
Irradiant du ciel caillé,
- Stupéfait, recroquevillé,
Hâlé, sali par la poussière,
Le pauvre paysage mort
Se ranime à l'heure nocturne,
Et puis, murmurant taciturne,
Extasié, rêve et s'endort.
La bonne ombre le rafraîchit ;
Et toute propre resurgit
Sa mélancolique peinture.
Avec l'aurore se levant,
La rosée, au souffle du vent,
Pleure pour laver la nature.
Irradiant du ciel caillé,
- Stupéfait, recroquevillé,
Hâlé, sali par la poussière,
Le pauvre paysage mort
Se ranime à l'heure nocturne,
Et puis, murmurant taciturne,
Extasié, rêve et s'endort.
La bonne ombre le rafraîchit ;
Et toute propre resurgit
Sa mélancolique peinture.
Avec l'aurore se levant,
La rosée, au souffle du vent,
Pleure pour laver la nature.
Maurice Rollinat
Alba chiara
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