vendredi 8 juillet 2016

YVES BONNEFOY DISPARAÎT EN SON ARRIÈRE-PAYS



"Je m'éveillai, c'était la maison natale"




"Et tôt après le ciel 
Nous consentait 
Cet or que l'alchimie 
Aura tant cherché "

Comment devient-on le plus célèbre des poètes français contemporains, traduit dans le monde entier et tant de fois cité pour le Nobel ? Peut-être en fournissant, en plus des poèmes, leur appareil critique. Avec Yves Bonnefoy, mort à Paris vendredi, à l’âge de 93 ans, on pourrait en tout cas, plus que d’une œuvre, parler d’un véritable système.
Né en 1923 d’une mère institutrice et d’un père ouvrier monteur, son enfance se partage entre la maison familiale de Tours et celle, durant les vacances d’été, du grand-père maternel à Toirac (Lot). C’est le côté Combray et Guermantes du poète, le «Longtemps je me suis couché de bonne heure» devenant «J ’ ai souvent é prouvé un sentiment d ’ inquiétude, à des carrefours», fameux incipit du grand récit autobiographique de 1972, L ’ Arrière-pays (paru vingt ans plus tard en Poésie/Gallimard). Toute l’imposante dialectique conjointement développée dans ses écrits poétiques et critiques prend racine dans l’alternance entre ces deux lieux. Les premiers recueils importants (Anti-Platon en 1947, Du mouvement et de l ’ immobilité de Douve en 1953, Hier régnant d é sert en 1958) posent ainsi une géographie où le territoire de la banalité quotidienne s’oppose à un ailleurs idyllique, l’écriture étant, déjà, la seule expérience permettant de dépasser ce clivage. Ses deux dernières livres, Ensemble encore et l’Echarpe rouge, recueils de poèmes et de proses (Mercure de France, 2016), explorent à nouveau le «côté» du père et celui de la mère.



"Et la vie a passé mais te garda 
Vive mon illusion"


À distance respectable des concepts, qu’il soupçonnait d’écraser l’expérience, Yves Bonnefoy n’a cessé de chercher à constituer une « poétique de la présence », s’approchant au plus près de ce que Rimbaud nomme, dans Une saison en enfer, la « réalité rugueuse ». L’âpreté de la réalité l’a rattrapé : le poète longtemps pressenti pour le prix Nobel de littérature est mort ce vendredi 1er juillet à l’âge de 93 ans.





Poète, traducteur, critique d’art, professeur au collège de France, plusieurs fois pressenti pour le prix Nobel de littérature, Yves Bonnefoy est mort le vendredi 1er juillet à Paris, à l’âge de 93 ans. Cet immense écrivain était un homme multiple. Malgré la diversité de ses activités, une même intuition semblait toujours guider sa démarche qu’il appelait « la vérité de parole », ou le souci de saisir « ce que la vie a d’immédiat ».
Dans l’intensité poétique, manifestant aussi une curiosité insatiable pour toutes les formes artistiques (il a écrit des essais sur Picasso, Balthus, Giacometti, Mondrian, Alechinsky), Yves Bonnefoy a construit une œuvre ouverte, à multiples entrées, dans laquelle l’expression est toujours approfondie par une exigence de pensée. Le poète se méfiait cependant du concept qui, pensait-il, nous écarte de l’essentiel : voulant à tout prix identifier nos expériences, il les limite, et nous prive, de surcroît, de la présence du monde. « La tâche du poète est de montrer un arbre, avant que notre intellect nous dise que c’est arbre », écrivait-il.












"J'ai souvent éprouvé un sentiment d'inquitude , 
à des carrefours"







"Écrire comme d'autres ont déssiné"


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