mardi 19 avril 2016

ALICE PRESTINT et FEDERICO PODANO : "Les prépondérants" HÉDI KADDOUR (GONCOURT DES LYCEENS ITALIENS 2016)





Les prépondérents : un roman enrichissant 


La narration se déroule, au début des années 1920, dans une ville imaginaire appelée Nahbès, où Arabes et Français vivent les uns avec les autres.
La relation entre eux sera inévitablement déséquilibrée par un événement vraiment inattendu: Hollywood arrive à Nahbès pour le tournage dun film, Guerrier des sables. Laccrochage entre Orient et Occident est exacerbé. La conduite de ces Américains heurte Arabes et Français; la modernité qu'ils amènent va bouleverser la ville; tout va se mélanger et entrer en collision: langues, moeurs, cultures Il y a la rencontre de trois univers : les prépondérants, club français d'élite, les aristocrates arabes et le cinéma américain.
Et alors, les protagonistes, du moment quils appartiennent à des différentes cultures, sont bien différentes lun des autres.
Il y a Rania, jeune femme de 19 ans, trop cultivée pour le modèle qui se convient aux femmes, et qui refuse de se remarier.
Il y a Raouf, cousin de Rania, cultivé “à loccidentale.
Il y a Gabrielle Conti, journaliste parisienne libre et curieuse. Il y a Ganthier, colon intelligent et autoritaire.
À des personnages si peu monotones, correspond un changement de lieu de la narration un peu brusque et sûrement inattendu: maintenant on n'est plus à Nahbès. On est en Europe, dabord en France et après en Allemagne, en suivant les aventures de Raouf, qui a dû s'en aller de son propre pays.
C'est seulement à la fin quon retourne à Nahbès, qui maintenant n'est plus la même qu'avant. 

Dans Les prépondérants, troisième roman de Hédi Kaddour, la caractérisation des personnages, parfaitement dessinés, et le style jouent un rôle de protagonistes.
Les pensées des personnages ne sont jamais banales, mais toujours justifiées, et donc compréhensibles pour le lecteur. Leur conduite est vraisemblable et cohérente. Les relations entre eux sont intéressantes et convaincantes.
La narration peut résulter parfois un peu trop lente, parfois un peu trop accélérée (comme dans le brusque changement Nahbès-Europe), mais lexposition est vraiment claire et linéaire.

Le contexte politique, culturel et social est bien décrit par lauteur.

 Pour conclure, Les prépondérants est un roman intelligent est bien réussi, qui affronte des thématiques modernes, comme lintégration des étrangers, de façon intéressante et originale.


Une lecture agréable et enrichissante.



Alice Prestint





Les Prépondérants : des prix bien mérités

       Les Prépondérants, le dernier livre du romancier franco-tunisien Hédi Kaddour, a obtenu beaucoup de succès et d’attention grâce aux deux prix qu’il a gagnés, c’est-à-dire le Prix Jean-Freustié et le Grand prix du roman de l'Académie française, et a sa place dans les quatre finalistes du prix Goncourt en France.

       La narration, qui est divisée en trois parties, commence au début des années 1920 à Nahbès, une ville imaginaire du Maghreb tunisien, où les arabes et les français qui ont colonisé la région (dont les plus influents forment la « Cercle des Prépondérants ») vivent ensemble, mais séparés par une barrière invisible. La population, en particulier Raouf (le fils du caîd), Rania (une jeune veuve de guerre cultivée et intelligente), Gabrielle Conti (une aventureuse journaliste parisienne) et Ganthier (« le seul Français que la domination n'a pas rendu idiot »), connaît un choc quand une troupe d’acteurs américains arrivent en ville pour tourner un film, « Le guerrier de sable ». Parmi eux, l’œil de l’auteur se concentre sur les personnages de Kathryn et Neil.
       Cet événement marque le début d’un bouleversant contact entre la modernité d’outre-Atlantique et la vie quotidienne de Nahbès qui va changer profondément les rapports entre ses habitants. Pour nous faire mieux comprendre les deux mentalités qui se rencontrent, deux histoires secondaires, une pour chaque partie (l’affaire Fatty et e le mariage de Belkhodja), s’entrelacent à la principale, laquelle voit enfin Raouf, en danger pour ses positions politiques, partir avec Ganthier pour un long voyage-fugue en Europe. Kathryn et Gabrielle aussi s’unissent au voyage, qui touche Paris, Strasbourg, Berlin et l’Allemagne occupée.
       L’histoire se termine dans une Nahbès turbulente, où Raouf a fait retour un an après avoir commencé son voyage.

       Les personnages sont le plus riche trésor de ce roman. Kaddour réussit parfaitement à nous faire assumer le regard de chacun d’eux, et notamment celui des protagonistes, de façon que même si on ne les aime pas on peut arriver à comprendre leur point de vue. L’analyse de leurs mentalités est fine et profonde et ne tombe jamais dans la banalité : pour cette raison, on ne pourra pas dire, après avoir lu ce livre, de n’avoir rien retenu de la partie du monde arabe qui y est décrite, ce qui est peut-être l’aspect le plus intéressant pour un lecteur occidental. A travers leur ville et eux-mêmes, Raouf et Rania nous conduisent dans un réalité vivante  et inconnue qui, par contre, est accueillie surtout par la compréhension à la fois difficile, mais curieuse et attentive, de Kathryn. La situation se renverse avec le voyage en Europe, qui rend Raouf aussi plus mûr.

       Le style utilisé convient à ce type de roman : des séquences narratives très analytiques forment la majorité du texte et les phrases souvent très longues donnent à l’histoire un rythme lent et réfléchi pur la plupart de l’œuvre. Cette technique, associé aux nombreuses pages du roman (460), peut rendre la lecture à la fois un peu difficile mais elle est compensée par les contenus.


       Les Prépondérants est donc une lecture qui va certainement nous laisser quelque chose.

Federico Podano

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