jeudi 16 octobre 2014

Les caractéristiques de la nature chez Alfred de Vigny: propositions pour une comparaison avec Giacomo Leopardi








JOURNEE d'ETUDE, 16 septembre 2013, Paris


Les caractéristiques de la nature chez Alfred de Vigny:

a) La nature refuge

b) La nature ni amie ni mère

c) La nature nous apprend la dignité







La Maison du Berger ( III vers 280-301)

Elle me dit : "Je suis l'impassible théâtre
Que ne peut remuer le pied de ses acteurs ;
Mes marches d'émeraude et mes parvis d'albâtre,
Mes colonnes de marbre ont les dieux pour sculpteurs.
Je n'entends ni vos cris ni vos soupirs ; à peine  5
Je sens passer sur moi la comédie humaine
Qui cherche en vain au ciel ses muets spectateurs.

"Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre,
A côté des fourmis les populations ;
Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre,  10
J'ignore en les portant les noms des nations.
On me dit une mère et je suis une tombe.
Mon hiver prend vos morts comme son hécatombe,
Mon printemps ne sent pas vos adorations.

"Avant vous j'étais belle et toujours parfumée,   15
J'abandonnais au vent mes cheveux tout entiers,
Je suivais dans les cieux ma route accoutumée,
Sur l'axe harmonieux des divins balanciers.
Après vous, traversant l'espace où tout s'élance,
J'irai seule et sereine, en un chaste silence         20
Je fendrai l'air du front et de mes seins altiers."




Introduction à l'analyse:


1)La nature se présente comme le cadre d'un théâtre.

Cette méthaphore se développe à travers la présentation

des éléments matériels du bâtiment suggérant une architecture

grecque  (v. 4 "colonnes ...") d'origine divine, 
   
avec des  "acteurs" (v.2),    des spectateurs (v.7) et
   
une pièce  (v. 6) en opposition évidente

avec ce décor grandiose.



2)Le 2e  strophe est  en parfaite correspondance avec Leopardi:

La nature est présentée comme une divinité cruelle et insensible



Natura«Immaginavi tu forse che il mondo fosse fatto per causa vostra? Ora sappi che nelle fatture, negli ordini e nelle operazioni mie, trattone pochissime, sempre ebbi ed ho l’intenzione a tutt’altro che alla felicità degli uomini o all’infelicità. Quando io vi offendo in qualunque modo e con qual si sia mezzo, io non me n’avveggo, se non rarissime volte: come, ordinariamente, se io vi diletto o vi benefico, io non lo so; e non ho fatto, come credete voi, quelle tali cose, o non fo quelle tali azioni, per dilettarvi o giovarvi. E finalmente, se anche mi avvenisse di estinguere tutta la vostra specie, io non me ne avvedrei.»

Giacomo LeopardiOperette Morali, Dialogo della natura e di un islandese.





3)Dans la 3e strophe,  le temps y apparaît à travers la double

indication  "Avant vous" (v. 15) et "Après vous" (v. 19)

et cette référence  chronologique illustre l'absence complète

d'interférence  entre la nature et l'histoire humaine.




La Maison du Berger  III vers 302-336)


"Aimez ce que jamais on ne verra deux fois."








Les oracles 

V

Toujours, sur ce cristal, rempart des grandes âmes,
La langue du sophiste ira heurter son dard.
Qu’il se morde lui-même en ses détours infâmes,
Qu’il rampe, aveugle et sourd, dans l’éternel brouillard.
Oublié, méprisé, qu’il conspire et se torde,
Ignorant le vrai beau, qu’il le souille et qu’il morde
Ce diamant que cherche en vain son faux regard.

VI

Le DIAMANT ! c’est l’art des choses idéales,
Et ses rayons d’argent, d’or, de pourpre et d’azur,
Ne cessent de lancer les deux lueurs égales
Des pensers les plus beaux, de l’amour le plus pur.
Il porte du génie et transmet les empreintes.
Oui, de ce qui survit aux nations éteintes,
C’est lui le plus brillant trésor et le plus dur.


28 mars 1862.

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