Le rêve d'un curieux
Connais-tu, comme moi, la douleur savoureuse,
Et de toi fais-tu dire : " Oh ! l'homme singulier
! "
- J'allais mourir. C'était dans mon âme amoureuse,
Désir mêlé d'horreur, un mal particulier ;
Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse.
Plus allait se vidant le fatal sablier,
Plus ma torture était âpre et délicieuse ;
Tout mon coeur s'arrachait au monde familier.
J'étais comme l'enfant avide du spectacle,
Haïssant le rideau comme on hait un obstacle...
Enfin la vérité froide se révéla :
J'étais mort sans surprise, et la terrible aurore
M'enveloppait. - Eh quoi ! n'est-ce donc que cela ?
Serge Reggiani : Monsieur Baudelaire ...
Il y a dans cette France
Quelque chose de rouillé
Comme des larmes d'enfance
Où jouent des écoliers
Et nous vivons ensemble
Uniformes déguisés
Nos sentiments ressemblent
À des nuages usés
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Encore un verre d'opium
Pour la route, le dernier
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Une page de delirium
Sous les yeux des douaniers
Il y a dans cette France
Trop d'idées poétiques
Trop de roseaux qui penchent
Trop de mots sans musique
C'est pas ma voix qui tremble
C'est moi qui suis lassé
De ces hommes qui me semblent
Intouchables et glacés
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Un peu de Fleurs du mal
Quelque chose à fumer
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Ça peut pas faire de mal
C'est du rêve imprimé
Il y a dans les cerveaux
Des cellules en vacances
C'est à croire que les veaux
Ont pris deux tours d'avance
Moi qui reste sur place
Je me plais à penser
Que quelque chose se passe
Avant qu'on soit passé
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Une petite poésie
Pour deux mots, pour la frime
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Un peu de fantaisie
Entre nous, pour la rime
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