Christine de Pisan
La ballade
Christine de Pisan (1363-1431)
Seulete suy et seulete veuil estre,
Seulete m'a mon doulz ami laissiée ;
Seulete suy, sanz compaignon ne maistre,
Seulete suy, dolente et courrouciée,
Seulete suy en languour mésaisée,
Seulete suy plus que nulle esgarée,
Seulete suy sanz ami demourée.
Seulete suy à huis ou à fenestre,
Seulete suy en un anglet muciée,
Seulete suy pour moi de plours repaistre,
Seulete suy, dolente ou apaisiée,
Seulete suy, riens n'est qui tant messiée,
Seulete suy en ma chambre enserrée,
Seulete suy sanz ami demourée.
Seulete suy partout et en tout estre,
Seulete suy, ou je voise ou je siée,
Seulete suy, plus qu'autre riens terrestre,
Seulete suy de chascun délaissiée,
Seulete suy durement abaissiée,
Seulete suy souvent toute éplourée,
Seulete suy sans ami demourée.
Princes, or est ma doulour commenciée :
Seulete suy de tout deuil menaciée,
Seulete suy plus teinte que morée,
Seulete suy sanz ami demourée.
Seulete m'a mon doulz ami laissiée ;
Seulete suy, sanz compaignon ne maistre,
Seulete suy, dolente et courrouciée,
Seulete suy en languour mésaisée,
Seulete suy plus que nulle esgarée,
Seulete suy sanz ami demourée.
Seulete suy à huis ou à fenestre,
Seulete suy en un anglet muciée,
Seulete suy pour moi de plours repaistre,
Seulete suy, dolente ou apaisiée,
Seulete suy, riens n'est qui tant messiée,
Seulete suy en ma chambre enserrée,
Seulete suy sanz ami demourée.
Seulete suy partout et en tout estre,
Seulete suy, ou je voise ou je siée,
Seulete suy, plus qu'autre riens terrestre,
Seulete suy de chascun délaissiée,
Seulete suy durement abaissiée,
Seulete suy souvent toute éplourée,
Seulete suy sans ami demourée.
Princes, or est ma doulour commenciée :
Seulete suy de tout deuil menaciée,
Seulete suy plus teinte que morée,
Seulete suy sanz ami demourée.
ETUDIER LA FORME DU POÈME (VERSIFICATION)
1. LA STROPHE est un ensemble de vers, séparé du reste du poème par deux blancs typographiques. La strophe en poésie équivaut au paragraphe dans un texte en prose, au couplet dans une chanson.
C-Je sais définir et employer : tercet - quatrain – quintil - sizain
2. LE VERS est une ligne de poésie ; le METRE indique le nombre de syllabes.
Attention ! le « e » muet ne compte pas devant une voyelle ou en fin de vers.
C-Je sais définir et employer : octosyllabe – décasyllabe - alexandrin
C-Je sais compter les syllabes d’un vers et traiter le cas du « e » muet
3. LA RIME est la répétition d’un même son en fin de vers. On distingue :
a) La qualité : pauvre/suffisante/riche, selon le nombre de sons qui font la rime.
b) La disposition : rimes suivies / rimes croisées / rimes embrassées
4. LE SONNET est un poème à forme fixe qui respecte les contraintes suivantes :
- 2 quatrains aux rimes embrassées (ABBA, ABBA),
- 2 tercets aux rimes suivies puis croisées (CCDEDE) ou suivies puis embrassées (CCDEED)
C-Je sais reconnaître un sonnet en justifiant ma réponse
5. LE RYTHME résulte de la longueur des mots et de leur disposition dans un vers.
a) Dans la poésie classique, l’alexandrin doit être composé en 6/6 => on appelle césurel’accent qui sépare les deux hémistiches (=« moitiés ») de l’alexandrin. Cela crée un rythme binaire.
b) Il arrive que la phrase ne coïncide par avec le vers : l’enjambement désigne le fait que la phrase se poursuive sur deux vers ; le rejet désigne le groupe de mots mis en évidence au début du vers suivant, après l’enjambement.
è L’intérêt est de commenter l’effet de rythme par rapport au sens.
6. LES EFFETS SONORES
a) Une ALLITERATION consiste en la répétition au sein d’un vers d’un même sonconsonantique.
b) Une ASSONANCE consiste en la répétition au sein d’un vers d’un même son vocalique.
C-Je suis attentif(ve) aux sonorités du poème pour identifier allitérations et assonances et lesinterpréter = les relier au sens du vers, du poème
C- strophe, vers, mètre, rimes (croisée, embrassées, suivies)/ sonnet / effets sonores : allitération et assonance / enjambement et rejet ; enjambement et rejet=>je sais définir ces mots et employer ces notions pour étudier un poème.
Les principales strophes
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Nom du vers
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Nombres de vers
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Le distique
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2 vers
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Le tercet
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3 vers
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Le quatrain
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4 vers
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Le quintil
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5 vers
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Le sizain
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6 vers
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Le septain
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7 vers
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Le huitain
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8 vers
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Le dizain
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10 vers
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Une ballade moderne de Jean Ferrat : La montagne
Ils quittent un à un le pays
Pour s’en aller gagner leur vie
Loin de la terre où ils sont nés
Depuis longtemps ils en rêvaient
De la ville et de ses secrets
Du formica et du ciné
Les vieux ça n’était pas original
Quand ils s’essuyaient machinal
D’un revers de manche les lèvres
Mais ils savaient tous à propos
Tuer la caille ou le perdreau
Et manger la tomme de chèvre
Pourtant que la montagne est belle
Comment peut-on s’imaginer
En voyant un vol d’hirondelles
Que l’automne vient d’arriver?
Avec leurs mains dessus leurs têtes
Ils avaient monté des murettes
Jusqu’au sommet de la colline
Qu’importent les jours les années
Ils avaient tous l’âme bien née
Noueuse comme un pied de vigne
Les vignes elles courent dans la forêt
Le vin ne sera plus tiré
C’était une horrible piquette
Mais il faisait des centenaires
A ne plus que savoir en faire
S’il ne vous tournait pas la tête
Pourtant que la montagne est belle
Comment peut-on s’imaginer
En voyant un vol d’hirondelles
Que l’automne vient d’arriver?
Deux chèvres et puis quelques moutons
Une année bonne et l’autre non
Et sans vacances et sans sorties
Les filles veulent aller au bal
Il n’y a rien de plus normal
Que de vouloir vivre sa vie
Leur vie ils seront flics ou fonctionnaires
De quoi attendre sans s’en faire
Que l’heure de la retraite sonne
Il faut savoir ce que l’on aime
Et rentrer dans son H.L.M.
Manger du poulet aux hormones
Pourtant que la montagne est belle
Comment peut-on s’imaginer
En voyant un vol d’hirondelles
Que l’automne vient d’arriver?