mercredi 15 octobre 2014

Machiavelli Le Prince chapitre XXV: Combien, dans les choses humaines,la fortune a de pouvoir,et comment on peut y résister.







Voici le 2e volet de notre cours concernant  Le Prince

Le chapitre XXV  met en évidence l'idée fondamentale de 

Machiavelli de  la "Fortuna intesa quale intelligenza motrice 

del mondo "  (Luigi Russo) et que  selon notre écrivain 

devait dépasser le myhe du Moyen-Âge d'une vertu  

contemplative (chrétienne) pour aboutir à une conception de 

gloire mondaine.




 Le Prince
Combien, dans les choses humaines,
la fortune a de pouvoir,
et comment on peut y résister.


Je n'ignore point que bien des gens ont pensé et pensent encore que Dieu et la fortune régissent les choses de ce monde de telle manière que toute la prudence humaine ne peut en arrêter ni en régler le cours : d'où l'on peut conclure qu'il est inutile de s'en occuper avec tant de peine, et qu'il n'y a qu'à se soumettre et à laisser tout conduire par le sort. Cette opinion s'est surtout propagée de notre temps par une conséquence de cette variété de grands événements que nous avons cités, dont nous sommes encore témoins, et qu'il ne nous était pas possible de prévoir - aussi suis-je assez enclin à la partager.
Néanmoins, ne pouvant admettre que notre libre arbitre soit réduit à rien, j'ima­gine qu'il peut être vrai que la fortune dispose de la moitié de nos actions, mais qu'elle en laisse à peu près l'autre moitié en notre pouvoir. Je la compare à un fleuve impé­tueux qui, lorsqu'il déborde, inonde les plaines, renverse les arbres et les édifices, enlève les terres d'un côté et les emporte vers un autre :  tout fuit devant ses ravages, tout cède à sa fureur; rien n'y peut mettre obstacle. Cependant, et quelque redoutable qu'il soit, les hommes ne laissent pas, lorsque l'orage a cessé, de chercher à pouvoir s'en garantir par des digues, des chaussées et autres travaux ; en sorte que, de nou­velles crues survenant, les eaux se trouvent contenues dans un canal, et ne puissent plus se répandre avec autant de liberté et causer d'aussi grands ravages. Il en est de même de la fortune, qui montre surtout son pouvoir là où aucune résistance n'a été préparée, et porte ses fureurs là où elle sait qu'il n'y a point d'obstacle disposé pour l'arrêter.
 Si l'on considère l'Italie, qui est le théâtre et la source des grands changements que nous avons vus et que nous voyons s'opérer, on trouvera qu'elle ressemble à une vaste campagne qui n'est garantie par aucune sorte de défense. Que si elle avait été pré­munie, comme l'Allemagne, l'Espagne et la France, contre le torrent, elle n'en aurait pas été inondée, ou du moins elle n'en aurait pas autant souffert.
 Me bornant à ces idées générales sur la résistance qu’on peut opposer à la fortune, et venant à des observations plus particularisées, je remarque d'abord qu'il n'est pas extraordinaire de voir un prince prospérer un jour et déchoir le lendemain, sans néanmoins qu'il ait changé, soit de caractère, soit de conduite. Cela vient, ce me semble, de ce que j'ai déjà assez longuement établi, qu'un prince qui s'appuie entière­ment sur la fortune tombe à mesure qu'elle varie. Il me semble encore qu'un prince est heureux ou malheureux, selon que sa conduite se trouve ou ne se trouve pas conforme au temps où il règne. Tous les hommes ont en vue un même but : la gloire et les richesses ; mais, dans tout ce qui a pour objet de parvenir à ce but, ils n'agissent pas tous de la même manière : les uns procèdent avec circonspection, les autres avec impétuosité ; ceux-ci emploient la violence, ceux-là usent d'artifice ; il en est qui sont patients, il en est aussi qui ne le sont pas du tout : ces diverses façons d'agir quoique très différentes, peuvent également réussir. On voit d'ailleurs que de deux hommes qui suivent la même marche, l'un arrive et l'autre n'arrive pas ; tandis qu'au contraire deux autres qui marchent très différemment, et, par exemple, l'un avec circonspection et l'autre avec impétuosité, parviennent néanmoins pareillement à leur terme : or d'où cela vient-il, si ce n'est de ce que les manières de procéder sont ou ne sont pas confor­mes aux temps? C'est ce qui fait que deux actions différentes produisent un même effet, et que deux actions pareilles ont des résultats opposés. C'est pour cela encore que ce qui est bien ne l'est pas toujours. Ainsi, par exemple, un prince gouverne-t-il avec circonspection et patience : si la nature et les circonstances des temps sont telles que cette manière de gouverner soit bonne, il prospérera ; mais il déchoira, au contraire, si, la nature et les circonstances des temps changeant, il ne change pas lui-même de système.
Changer ainsi à propos, c'est ce que les hommes même les plus prudents ne savent point faire, soit parce qu'on ne peut agir contre son caractère, soit parce que, lorsqu'on a longtemps prospéré en suivant une certaine route, on ne peut se persuader qu'il soit bon d'en prendre une autre. Ainsi l'homme circonspect, ne sachant point être impé­tueux quand il le faudrait, est lui-même l'artisan de sa propre ruine. Si nous pouvions changer de caractère selon le temps et les circonstances, la fortune ne changerait jamais.
Le pape Jules II fit toutes ses actions avec impétuosité ; et cette manière d'agir se trouva tellement conforme aux temps et aux circonstances, que le résultat en fut toujours heureux. Considérez sa première entreprise, celle qu'il fit sur Bologne, du vivant de messer Giovanni Bentivogli : les Vénitiens la voyaient de mauvais oeil, et elle était un sujet de discussion pour l'Espagne et la France; néanmoins, Jules s'y précipita avec sa résolution et son impétuosité naturelles, conduisant lui-même en per­sonne l'expédition; et, par cette hardiesse, il tint les Vénitiens et l'Espagne en respect, de telle manière que personne ne bougea : les Vénitiens, parce qu'ils crai­gnaient, et l'Espagne, parce qu'elle désirait recouvrer le royaume de Naples en entier. D'ailleurs, il entraîna le roi de France à son aide ; car ce monarque, voyant que le pape s'était mis en marche, et souhaitant gagner son amitié, dont il avait besoin pour abaisser les Vénitiens, jugea qu'il ne pouvait lui refuser le secours de ses troupes sans lui faire une offense manifeste. Jules obtint donc, par son impétuosité, ce qu'un autre n'aurait pas obtenu avec toute la prudence humaine ; car s'il avait attendu, pour partir de Rome, comme tout autre pape aurait fait, que tout eût été convenu, arrêté, préparé, certainement il n'aurait pas réussi. Le roi de France, en effet, aurait trouvé mille moyens de s'excuser auprès de lui, et les autres puissances en auraient eu tout autant de l'effrayer.
Je ne parlerai point ici des autres opérations de ce pontife, qui, toutes conduites de la même manière, eurent pareillement un heureux succès. Du reste, la brièveté de sa vie ne lui a pas permis de connaître les revers qu'il eût probablement essuyéss'il était survenu dans un temps où il eût fallu se conduire avec circonspection ; car il n'aurait jamais pu se départir du système de violence auquel ne le portait que trop son caractère.
Je conclus donc que, la fortune changeant, et les hommes s'obstinant dans la même manière d'agir, ils sont heureux tant que cette manière se trouve d'accord avec la fortune ; mais qu'aussitôt que cet accord cesse, ils deviennent malheureux.
Je pense, au surplus, qu'il vaut mieux être impétueux que circonspect; car la fortune est femme : pour la tenir soumise, il faut la traiter avec rudesse ; elle cède plutôt aux hommes qui usent de violence qu'à ceux qui agissent froidement : aussi est-elle toujours amie des jeunes gens, qui sont moins réservés, plus emportés, et qui commandent avec plus d'audace.














Machiavelli Le Prince chapitre XVIII : Comment les princes doivent tenir leur parole




     Bonjour,
Dans l'attente du cours de demain  avec Madame Carla Soresina, 
notre prof bien-aimée de Letteratura Italiana,  à propos du Prince 
de Machiavelli,chapitre XVIII  In che modo i principi abbino a mantenere
 la fede , je vous invite (IID ESABAC) à la lecture en traduction française, avec un lien pour retrouver l'oeuvre complète.




Le Prince

Comment les princes doivent tenir leur parole.


Chacun comprend combien il est louable pour un prince d'être fidèle à sa parole et d'agir toujours franchement et sans artifice. De notre temps, néanmoins, nous avons vu de grandes choses exécutées par des princes qui faisaient peu de cas de cette fidélité et qui savaient en imposer aux hommes par la ruse. Nous avons vu ces princes l'emporter enfin sur ceux qui prenaient la loyauté pour base de toute leur conduite.

On peut combattre de deux manières : ou avec les lois, ou avec la force. La pre­mière est propre à l'homme, la seconde est celle des bêtes ; mais comme souvent celle-là ne suffit point, on est, obligé de recourir à l'autre : il faut donc qu'un prince sache agir à propos, et en bête et en homme. C'est ce que les anciens écrivains ont enseigné allégoriquement, en racontant qu'Achille et plusieurs autres héros de l'anti­quité avaient été confiés au centaure Chiron, pour qu'il les nourrît et les élevât.

Par là, en effet, et par cet instituteur moitié homme et moitié bête, ils ont voulu signifier qu'un prince doit avoir en quelque sorte ces deux natures, et que l'une a besoin d'être soutenue par l'autre. Le prince devant donc agir en bête, tâchera d'être tout à la fois renard et lion : car, s'il n'est que lion, il n'apercevra point les pièges; s'il n'est que renard, il ne se défendra point contre les loups ; et il a également besoin d'être renard pour connaître les pièges, et lion pour épouvanter les loups. Ceux qui s'en tiennent tout simplement à être lions sont très malhabiles.

Un prince bien avisé ne doit point accomplir sa promesse lorsque cet accomplis­sement lui serait nuisible, et que les raisons qui l'ont déterminé à promettre n'existent plus : tel est le précepte à donner. Il ne serait pas bon sans doute, si les hommes étaient tous gens de bien; mais comme ils sont méchants, et qu'assurément ils ne vous tiendraient point leur parole, pourquoi devriez-vous leur tenir la vôtre? Et d'ailleurs, un prince peut-il manquer de raisons légitimes pour colorer l'inexécution de ce qu'il a promis?

A ce propos on peut citer une infinité d'exemples modernes, et alléguer un très grand nombre de traités de paix, d'accords de toute espèce, devenus vains et inutiles par l'infidélité des princes qui les avaient conclus. On peut faire voir que ceux qui ont su le mieux agir en renard sont ceux qui ont le plus prospéré.

Mais pour cela, ce qui est absolument nécessaire, c'est de savoir bien déguiser cette nature de renard, et de posséder parfaitement l'art et de simuler et de dissimuler. Les hommes sont si aveugles, si entraînés par le besoin du moment, qu'un trompeur trouve toujours quelqu'un qui se laisse tromper.

Parmi les exemples récents, il en est un que je ne veux point passer sous silence.

Alexandre VI ne fit jamais que tromper; il ne pensait pas à autre chose, et il en eut toujours l'occasion et le moyen. Il n'y eut jamais d'homme qui affirmât une chose avec plus d'assurance, qui appuyât sa parole sur plus de serments, et qui les tint avec moins de scrupule : ses tromperies cependant lui réussirent toujours, parce qu'il en connaissait parfaitement l'art.

Ainsi donc, pour en revenir aux bonnes qualités énoncées ci-dessus, il n'est pas bien nécessaire qu'un prince les possède toutes ; mais il l'est qu'il paraisse les avoirJ'ose même dire que s'il les avait effectivement, et s'il les montrait toujours dans sa conduite, elles pourraient lui nuire, au lieu qu'il lui est toujours utile d'en avoir l'apparence. Il lui est toujours bon, par exemple, de paraître clément, fidèle, humain, religieux, sincère ; il l'est même d'être tout cela en réalité : mais il faut en même temps qu'il soit assez maître de lui pour pouvoir et savoir au besoin montrer les qualités opposées.

 On doit bien comprendre qu'il n'est pas possible à un prince, et surtout à un prince nouveau, d'observer dans sa conduite tout ce qui fait que les hommes sont réputés gens de bien, et qu'il est souvent obligé, pour maintenir l'État, d'agir contre l'humanité, contre la charité, contre la religion même. Il faut donc qu'il ait l'esprit assez flexible pour se tourner à toutes choses, selon que le vent et les accidents de la fortune le commandent ; il faut, comme je l'ai dit, que tant qu'il le peut il ne s'écarte pas de la voie du bien, mais qu'au besoin il sache entrer dans celle du mal.

Il doit aussi prendre grand soin de ne pas laisser échapper une seule parole qui ne respire les cinq qualités que je viens de nommer ; en sorte qu'à le voir et à l'entendre on le croie tout plein de douceur, de sincérité, d'humanité, d'honneur, et principale­ment de religion, qui est encore ce dont il importe le plus d'avoir l'apparence : car les hommes, en général, jugent plus par leurs yeux que par leurs mains, tous étant à portée de voir, et peu de toucher. Tout le monde voit ce que vous paraissez ; peu connaissent à fond ce que vous êtes, et ce petit nombre n'osera point s'élever contre l'opinion de la majorité, soutenue encore par la majesté du pouvoir souverain.

Au surplus, dans les actions des hommes, et surtout des princes, qui ne peuvent être scrutées devant un tribunal, ce que l'on considère, c'est le résultat. Que le prince songe donc uniquement à conserver sa vie et son État : s'il y réussit, tous les moyens qu'il aura pris seront jugés honorables et loués par tout le monde. Le vulgaire est toujours séduit par l'apparence et par l'événement : et le vulgaire ne fait-il pas le monde? Le petit nombre n'est écouté que lorsque le plus grand ne sait quel parti prendre ni sur quoi asseoir son jugement.

De notre temps, nous avons vu un prince [1] (1) qu'il ne. convient pas de nommer, qui jamais ne prêcha que paix et bonne foi, mais qui, s'il avait toujours respecté l'une et l'autre, n'aurait pas sans doute conservé ses États et sa réputation.


[1]      Ferdinand le Catholique, roi d'Aragon.










Robert Bresson : lo sguardo dell'accettazione



Dans l'attente de la visite 
de l'Eglise de San Fedele à Milan 
mardi le 21 octobre (V D)
je vous invite  à ce 

CINEFORUM  dédié à Robert Bresson 











Auditorium e Galleria San Fedele (Via Ulrico Hoepli, 3a/b - Milano)
Martedì 21 ottobre 2014
ore 18.30: Incontro con  Mylène Bresson
ore 21.00: Un condamné à mort s’est échappé (1956

Martedì 4 novembre 2014
ore 18.30: Tavola rotonda, Come un soffio, come un gesto, come una luce
ore 21.00: L’Argent (1983)
Martedì 25 novembre 2014ore 18.30: Mostra, Georges Rouault - La notte della redenzione
ore 21.00: Au hasard Balthasar (1966)
Martedì 16 dicembre 2014ore 18.30: Laboratorio cinematografico per studenti universitari
ore 21.00: Pickpocket (1959)
Martedì 20 gennaio 2015 ore 18.30: Conferenza, Bresson e la cultura teologica francese
ore 21.00: Mouchette (1967)
Ingresso: €7 / € 4 (studenti)
Abbonamenti: € 25 / € 15 (studenti)
info e prevendite: Biglietteria Auditorium lun-ven 10/12.30 - 14/18

tel.0286352231 -  www.centrosanfedele.netacquisto on line:

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Per informazioni
Auditorium Via Hoepli 3/b, 20121 Milano
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