vendredi 13 novembre 2015

ESSAI BREF : PAYSAGES : REFLET DU MONDE, REFLET DE L'AME





Esabac ordinaria 2015
b) Saggio breve

Dopo avere analizzato l’insieme dei documenti, formulate un saggio breve in riferimento al tema posto (circa 600 parole)



Paysages : reflet du monde, reflet de l’âme ?


Document n 1

Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours
! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !

Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire,
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !

Oui, dans ces jours d'automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d'attraits,
C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais !


Ainsi, prêt à quitter l'horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l'espoir évanoui,
Je me retourne encore, et d'un regard d'envie
Je contemple ses biens dont je n'ai pas joui !

Terre, soleil, vallons, belle et douce nature,
Je vous dois une larme aux bords de mon tombeau ;
L'air est si parfumé ! la lumière est si pure !
Aux regards d'un mourant le soleil est si beau !

Je voudrais maintenant vider jusqu'à la lie
Ce calice mêlé de nectar et de fiel !
Au fond de cette coupe où je buvais la vie,
Peut-être restait-il une goutte de miel ?

Peut-être l'avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l'espoir est perdu ?
Peut-être dans la foule, une âme que j'ignore
Aurait compris mon âme, et m'aurait répondu ? ...

La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphire ;
A la vie, au soleil, ce sont là ses adieux ;

Moi, je meurs; et mon âme, au moment qu'elle expire,
S'exhale comme un son triste et mélodieux.



           Alphonse de Lamartine, « L'Automne », Méditations poétiques (1820)



Document 2 

Julien poursuivait son chemin gaiement au milieu des plus beaux aspects que puissent présenter les scènes de montagnes. Il fallait traverser la grande chaîne au nord de Vergy. Le sentier qu’il suivait, s’élevant peu à peu parmi de grands bois de hêtres, forme des zigzags infinis sur la pente de la haute montagne qui dessine au nord la vallée du Doubs. Bientôt les regards du voyageur, passant par-dessus les coteaux moins élevés qui contiennent le cours du Doubs vers le midi, s’étendirent jusqu’aux plaines fertiles de la Bourgogne et du Beaujolais. Quelque insensible que l’âme de ce jeune ambitieux fût à ce genre de beauté, il ne pouvait s’empêcher de s’arrêter de temps à autre, pour regarder un spectacle si vaste et si imposant.
Enfin il atteignit le sommet de la grande montagne, près duquel il fallait passer pour arriver, par cette route de traverse, à la vallée solitaire qu’habitait Fouqué, le jeune marchand de bois son ami. Julien n’était point pressé de le voir, ni aucun autre être humain. Caché comme un oiseau de proie, au milieu des roches nues qui couronnent la grande montagne, il pouvait apercevoir de bien loin tout homme qui se serait approché de lui. Il découvrit une petite grotte au milieu de la pente presque verticale d’un des rochers. Il prit sa course, et bientôt fut établi dans cette retraite. Ici, dit-il avec des yeux brillants de joie, les hommes ne sauraient me faire de mal.

                                                               Stendhal, Le Rouge et le Noir (1830)

Document 3


Pour une surprise, c'en fut une. À travers la brume, c'était tellement étonnant ce qu'on découvrait soudain que nous nous refusâmes d'abord à y croire et puis tout de même quand nous fûmes en plein devant les choses, tout galérien qu'on était1 on s'est mis à bien rigoler, en voyant ça, droit devant nous...
Figurez-vous qu'elle était debout leur ville, absolument droite. New York c'est une ville debout.  On en avait déjà vu nous des villes bien sûr, et des belles encore, et des ports et des fameux mêmes.  Mais chez nous, n'est-ce pas, elles sont couchées les villes, au bord de la mer ou sur les fleuves, elles s'allongent sur le paysage, elles attendent le voyageur, tandis que celle-là l'Américaine, elle ne se pâmait pas, non, elle se tenait bien raide, là, pas baisante2 du tout, raide à faire peur.
On en a donc rigolé comme des cornichons. Ça fait drôle forcément, une ville bâtie en raideur.  Mais on n'en pouvait rigoler nous du spectacle qu'à partir du cou, à cause du froid qui venait du large pendant ce temps-là à travers une grosse brume grise et rose et rapide et piquante à l'assaut de nos pantalons et des crevasses de cette muraille, les rues de la ville, où les nuages s'engouffraient aussi à la charge du vent.  


  1. Malgré notre situation de galérien.
  2. La ville couchée évoque la femme couchée.
                                                                 Céline, Le Voyage au bout de la nuit (1932) Document 4   


  3. Un bubbolio lontano...
    Rosseggia l'orizzonte,
    Come affocato, a mare;
    Nero di pece, a monte,
    Stracci di nubi chiare:
    Tra il nero un casolare:
    Un'ala di gabbiano.



                                                                                Giovanni Pascoli, “Temporale”, Myricae (1891)



    Un roulement dans le lointain...

    L'horizon qui rougeoie,

    Tel un brasier, du côté de la mer ;

    D'un noir de poix, vers les montagnes, Des lambeaux de nuages clairs :

    Dans tout ce noir une chaumière :

    Une aile éployée de mouette.



                                                 Giovanni Pascoli, Temps d'orage, Myricae (1891)

                                                                 Traduction de Maurice Javion (Anthologie bilingue de la poésie                 italienne, La Pléiade, Gallimard) 





  4. Caspar David Friedrich, Le Voyageur contemplant une mer de nuages, 
             Kunsthalle de Hambourg (1817)

    Pour cet artiste  « l’art se présente comme médiateur entre la nature et l’homme », et  « le peintre ne doit pas peindre seulement ce qu’il voit en face de lui, mais aussi ce qu’il voit en lui ».