mardi 29 septembre 2015

Marcel Proust "Rembrandt" avec un commentaire d'Antoine Compagnon






De retour de Montpellier j'ai proposé

 à mes bons  élèves de V D

la rédaction d'un texte portant sur le Musée Fabre.

Dans l'attente de lire leurs ouvrages

voici une citation proustienne commentée, 

par Antoine Compagnon, 

que  mes  chers élèves ...



 dormeurs   de III D ESABAC

pourront apprendre par coeur.






"Les musées sont des maisons qui abritent seulement 

des pensées.Ceux qui sont le moins capables de pénétrer

ces pensées savent que ce sont des pensées qu'ils regardent 

dans ces tableaux placés les uns après les autres, que ces 

tableaux sont précieux, et que la toile, les couleurs qui

 s'y sont séchées et le bois doré lui-même qui l'encadre 

ne le sont pas."


Marcel Proust "Rembrandt"



Proust entreprit un article sur Rembrandt resté inédit de son vivant: « Étant à Amsterdam à une exposition de Rembrandt,
 je vis […]. » Il s’agit à nouveau d’une méditation sur le musée, commençant ainsi: « Les musées sont des maisons qui abritent seulement des pensées. Ceux qui sont le moins capables de pénétrer ces pensées savent que ce sont des pensées qu’ils regardent, dans ces tableaux placés les uns après les autres. » Devant Le Bœuf écorché, dont le Louvre possède une version,
 La Femme adultère51, ou Esther52, le visiteur se rend compte 

« que ce ne sont pas des choses que Rembrandt a peintes, 
ce sont les goûts de Rembrandt »

Tous les tableaux d’un grand peintre, toutes les œuvres d’un grand artiste, suivant une thèse centrale de la future Recherche, n’en font qu’une; ils expriment la même idée originale éternellement répétée. C’est pourquoi une visite au musée est la recherche d’une idée: « une promenade dans un musée n’aura d’intérêt véritable pour un penseur que quand en aura tout d’un coup jailli une de ces idées, qui aussitôt lui paraissent riches et susceptibles d’en engendrer d’autres précieuses! » 



Pèlerins d’Emmaüs de Rembrandt




Proust cite encore Les Pèlerins d’Emmaüs et Le Bon Samaritain, sans doute les deux tableaux du Louvre (où le second est attribué aujourd’hui à l’école de Rembrandt), mais aussi Homère, tableau du Mauritshuis exposé à Amsterdam53. Le manuscrit se termine par l’entrée d’« un vieillard aux longs cheveux bouclés, à la démarche 
cassée » dans une salle de l’exposition Rembrandt: ce serait Ruskin, que Proust pense donc avoir vu une fois en chair et en os avant de se passionner pour son œuvre et de la traduire (Ruskin, malade depuis longtemps, ne s’est pas rendu à Amtserdam). Comme à l’opéra, le spectacle est aussi dans la salle: le musée prolonge la vie de salon; l’exposition l’étend aux villes d’art européennes. 

Antoine Compagnon "Proust au musée"