mardi 13 janvier 2015

Charles Baudelaire "Le Port"













Un port est un séjour charmant pour une âme fatiguée des luttes de la vie.  L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux sans jamais les lasser.  Les formes élancées des navires, au gréement compliqué, auxquels la houle imprime des oscillations harmonieuses, servent à entretenir dans l'âme le goût du rythme et de la beauté.  Et puis, surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux qui reviennent, de ceux qui ont encore la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir.

Charles Baudelaire, Le port,  

Le Spleen de Paris (pièce XLI), (1969)

commentaire composé




Les phares







MOULOUDJI : Faut vivre












Il y a peut-être 150 millions de galaxies
contenant chacune 120, 150 millions d´étoiles...
A des centaines de milliers d´années lumières...
Il y a des centaines d´autres galaxies
contenant encore des milliards d´étoiles...
Poussière dans un Sahara d´étoiles...





Malgré les grands yeux du néant
c´est pour mieux nous manger enfant
et les silences et les boucans...
faut vivre

bien qu´aveugles sur fond de nuit
entre les gouffres infinis
des milliards d´étoiles qui rient...
faut vivre...

malgré qu´on soit pas toujours beau
et que l´on ait plus ses seize ans
et sur l´espoir un chèque en blanc
faut vivre...

malgré le cœur qui perd le nord
au vent d´amour qui souffle encore
et qui parfois encore nous grise
faut vivre...

malgré qu´on ait pas de génie
n´est pas Rimbaud qui peut pardi
et qu´on se cherche un alibi
malgré tous nos morts en goguette
qui errent dans les rues de nos têtes
faut vivre...

malgré qu´on soit brave et salaud
qu´on est des complexes à gogo
et qu´on les aime c´est ça le pire
faut vivre...

malgré l´idéal du jeune temps
qui c´est usé au nerf du temps
et par d´autre repris en chantant
faut vivre...

malgré qu´en s´tournant vers l´passé
on est effrayé de s´avouer
qu´on a tout de même un peu changer
faut vivre...

malgré qu´on soit du même voyage
qu´on vive en fou, qu´on vive en sage
tout finira dans un naufrage
faut vivre...

malgré qu´au ciel de nos poitrines
en nous sentinelle endormie
dans un bruit d´usine gémit
le cœur aveugle qui funambule
sur le fil du présent qui fuit
faut vivre...

malgré qu´en nous un enfant mort
parfois si peu sourit encore
comme un vieux rêve qui agonise
faut vivre...

malgré qu´on soit dans l´engrenage
des notaires et des héritages
ou le cœur s´écœure et s´enlise
faut vivre...

malgré qu´on fasse de l´humour noir
sur l´amour qui nous en fera voir
jusqu´à ce qu´il nous dise au revoir
faut vivre...

malgré qu´à tous les horizons
comme un point d´interrogation
la mort nous regarde d´un œil ivre
faut vivre...

malgré tous nos serments d´amour
tous nos mensonges jour après jour
et bien que l´on ait qu´une vie
une seule pour l´éternité
malgré qu´on la sache ratée....

Faut vivre...