vendredi 26 septembre 2014

Michel Bühler : Djamel - Soleil de plomb














T'en souviens-tu, Djamel, quand tu as débarqué,
(Les cousins t'avaient dit qu' c'était la Terre promise)
On t'a pris tes papiers, on t'a déshabillé,
Tu as attendu des heures sans même une chemise.
Te souviens-tu, Djamel, des regards de mépris
Des autres voyageurs, quand tu as pris le train?
Toi tu voulais sourire, et tu n'as pas compris
Qu' c'était le commenc'ment d'un nouveau quotidien.

Te souviens-tu, Djamel, du patron de bistro
Qui t'a r'fusé une bière, un jour, rue des Abbesses?
Comm' tu n' te fâchais pas, qu' tu demandais de l'eau,
L'a fait sortir son chien de sous le tiroir caisse.
Te souviens-tu, Djamel, du soir où tu t'es fait
Casser bêt'ment la gueule par une bande de tondus?
Il y a des beaux quartiers qu'il vaut mieux éviter
Quand on n'est pas comme ceux qui possèdent les rues.

Te souviens-tu, Djamel, des boulots des débuts:
Balayeur, éboueur, manoeuvre sur les chantiers,
Et la gamelle froide et la chambre exigüe,
Te voilà installé, mais tout n'a pas changé,
Maint'nant tu sais, Djamel, quand tu passes au péage
D'une autoroute, que tu vas te faire arrêter:
Les flics, c'est bien connu, respectent les usages.
L'usage veut qu'on controle plutôt les gens bronzés

Et tu verrais Djamel, si tu venais chez moi
Le temps qu'il te faudrait pour passer la frontière
Avec tes cheveux longs, ton accent de là-bas,
Faut dire que tu n'as pas l'allure d'un homme d'affaires.
On pourrait continuer: Djamel t'en souviens-tu
Les sarcasmes des filles, la haine des parents...
Ce que je voulais dire, c'est simplement salut
A toi et à tous ceux que l'on dit différents,

Ce que je voulais dire, c'est simplement salut
A toi et à tous ceux que l'on dit différents!






Soleil de plomb
Sable brûlant
Le lourd camion
Bringuebalant
Chargé d´humains
Tout poussiéreux
Va son chemin
Va comme il peut
Les nuits, les jours
Dunes et pierres
La piste court
Sur le désert
Avec l´angoisse
La soif immense
Les heures passent
A quoi l´on pense?

Il en faut du courage
Pour quitter son village
Et partir vers le nord
Derrière toi, petit frère
Il n´y a que la misère
Et l´avenir est mort

Soleil de plomb
Et l´océan
Sur l´horizon
Vieux bateau blanc
Plutôt esquif
Prêt à couler
Moteur poussif
Hommes serrés
Le passeur a pris
Le bel argent
Puis il a dit
"C´est droit devant"
Le froid la peur
Vagues qui dansent
Passent les heures
A qui l´on pense?

Il en faut du courage
Pour quitter son village
Et chercher l´autre bord
Accroche-toi, petit frère
Encore un peu de mer
Et ce sera le port

Soleil de plomb
Sur un grand champ
Parqués en rond
Les survivants
Les gardes au loin
Les barbelés
Bottes et chiens
Fusils chargés
L´Europe rit
Juste à deux pas
Là, c´est écrit
"Rentre chez toi"
Pire que la mer
Qui bat sans fin
Et le désert
Y a les humains

Il faudrait du courage
A la fin du voyage
Pour espérer encore
C´est à croire, petit frère
Que pour toi sur la Terre
Y aura jamais de port

C´est à croire, petit frère
Que pour toi sur la Terre
Y a qu´ la faim et la mort









Linda Lemay : De tes rêves a mes rêves







 J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé...

  (Desnos)










   


On a parcouru le chemin
De tes rêves à mes rêves
Tes doigts à mes seins
De ta bouche à mes lèvres
De la guerre à la trêve
Combien d' fois, mon amour
Combien d'aller-retour
Entre la haine et l'amour

Chaque fois, la route et ses chaos
Et ses roches et ses trous
M'arrachaient à ta peau
Me rejetaient sur tes genoux
Me tatouaient sur ta joue
Combien de grands voyages
Pour autant de naufrages
Sur ce même rivage

Jusqu'au jour où j'ai dit: "Va t'en !
J'ai plus rien à blesser
Qui soit vierge de coups
Je suis fatiguée des kilomètres
Qu'on franchit pour être
À un plus mauvais bout"

J'ai dit: "Prends ta voiture de fortune
Et roule tant que tu voudras
Va t'en donc promettre ta lune
À une autre que moi"

Je croyais pas que tu allais m'obéir
À la lettre comme ça
Je t'ai regardé partir
En mourant tout bas
Sur la véranda
Brisée à des endroits
Que j' me connaissais pas
Entre mon coeur et tes bras

Les étoiles que j'avais dans l' regard
Et qui semblaient te plaire
Sont venues s'échouer
Comme des étoiles de mer
Sur l'estran désert
Le coeur comme un souvenir
Le corps comme un grenier
J'ai eu peur de m'écrouler

Je sais pas de quelle manière
Comme poussée par le vent
J' me suis mise à poursuivre, en courant
Le nuage de poussière
Qu' ta voiture de misère
Faisait tourbillonner en filant

Puis j'ai crié: "Attends-moi j'arrive !
Je peux pas vivre sans toi
Et si c'est pas une vie de te suivre
Et bien ce sera ce que ce sera

Tu as encore, dans les mains
La petite cuillère
Qui me ramassait si bien
Quand je m'écrasais par terre
T'as encore, dans les mains
La petite caresse
Qui me ferait, comme un chien
Haleter d'allégresse"
Ah, ah, ah, ah
Ah, ah, ah, ah

Mais, bien sûr, t'as rien entendu
Et ton nuage et toi
Vous avez disparu
Et je suis restée là
Comme un cheval de bois
Qui ne berce plus personne
Et que l'on abandonne
Que l'on met au rebus

Un jour que je me croyais mieux
Que j'allais au village
Et que c'était pluvieux
À deux nuages d'un orage
À faire taire les oiseaux
À deux pas du resto
Et à trois du garage
À deux doigts d'oublier

Perdue dans mon imperméable
Et dans quelques pensées
Comme: "C'est drôle dans le sable
Toutes ces traces de souliers"
Comme: "Je sais pas ce que j' vais foutre
De ma longue soirée"
Juste à coté de moi
Ce parfum agréable
Ces cheveux familiers
C'était... c'était toi

Et l'orage éclata
En même temps que le morceau de chair
Qui me servait de coeur
Et le vent se leva
En même temps qu'un éclair
Nous fit tous les deux trembler de peur

J'ai dit: "Si tu viens pour les étoiles
Elles sont tombées dans la boue
Si t'es là pour me voir, j' te signale
Qu' y'a plus rien à voir du tout"

Tu as dis: "J'ai parcouru
Les chemins de mes rêves
À des rêves qui n'étaient pas les tiens
J' voulais juste que tu saches, mon amour
Que ces foutus parcours
Ont toujours été vains"
Ah, ah, ah
Ah, ah, ah, ah

Alors j'ai dit: "Puisque tu es là
Viens donc prendre un café
Si tu veux, tu jetteras
Quelques bûches au foyer
Ça nous réchauffera
Le temps que l'orage passe
Et que le feu s'embrase
Comme autrefois !"

Et c'est là qu' t'as baissé les yeux
Que t'as dit: "Je pourrai pas
Car, tu vois, y a un voeu
Que j'ai fait là-bas
Elle te ressemble un peu
Celle à qui j'ai dit: "Oui"
Ce petit "Oui" précieux
Que je n' t'ai jamais dit"
Tu as ajouté qu'aussi
Elle prend bien soin du petit
Et que tu es déjà trop vieux, aujourd'hui
Pour réparer l'erreur
La pire de ta vie
Qui est celle d'être parti d'ici

Tu t’es mis à genoux dans la vase
Pour me demander pardon
Le tonnerre m'a volé ta phrase
Et tu t'es levé d'un bond

Et tu es parti, l'air malheureux
Le pantalon tout sale
Et, au coin de mes yeux
Y'avait comme... des étoiles








La mort de l'ours de Félix Leclerc






 J'ai toujours préféré les loups.....

les vrais...





  
La mort de l'ours

Où allez-vous, Papa loup
Chapeau mou, médaille au cou
Vous a-t-on nommé shérif
Des montagnes et des récifs ?

Non, mon fils, j'ai pris un bain
Chaussé guêtres et canne en main
Vais porter hommage au roi
Si tu veux, viens avec moi

N'orignal ni carcajou
Je ne connais roi que vous
Peigne plutôt tes poils fous
Et suis-moi à pas de loup

Ils ont marché quatre lieux
Arrivés près d'un torrent
Sauvage et débordant
De cris et de chants d'adieu

Bonjour Sire, c'est moi, le loup
M'voyez-vous, m'entendez-vous ?
Suis venu à travers bois
Vous saluer, comme ils se doit

Il se tient droit, salue l'ours
Qui a la patte dans le piège
Plein de sang dessus la mousse
Et tombe la première neige

Le petit loup est ému
Et voudrait rentrer chez lui
Le gros ours, le gros poilu
Lui sourit et dit merci

Ils sont revenus de nuit
A travers bouleaux jolis
Le plus grand marchait devant
Et pleurait abondamment.
























BAC BLANC : Commentaire dirigé : "Mémoires d'Outre-Tombe" François-René de Chateaubriand - Essai bref : "La Nature chez les poètes romantiques : analogies et différences"





 



Eugène Delacroix Dante et Virgile (1822)







SEZIONE ESABAC

BAC BLANC

Prova di: LINGUA E LETTERATURA FRANCESE
                                   
Svolga il candidato una delle seguenti prove a scelta tra:

a)       analisi di un testo
b)       saggio breve

a) Analisi di un testo

Dopo avere letto il testo rispondete alle domande e elaborate una riflessione personale sul tema proposto.

Grâce à l'exorbitance de mes années, mon monument est achevé. Ce m'est un grand soulagement; je sentais quelqu'un qui me poussait; le patron de la barque sur laquelle ma place est retenue m'avertissait qu'il ne me restait qu'un moment pour monter à bord. Si j'avais été le maître de Rome, je dirais comme Sylla que je finis mes Mémoires la veille même de ma mort; mais je ne conclurais pas mon récit par ces mots comme il conclut le sien: "J'ai vu en songe un de mes enfants qui me  montrait Métella sa mère, et m'exhortait à venir jouir du repos dans le sein de la félicité éternelle." Si j'eusse été Sylla, la gloire ne m'aurait jamais pu donner le repos et la félicité.
Des orages nouveaux se formeront; on croit pressentir des calamités qui  l'emporteront sur les afflictions dont nous avons été comblés; déjà, pour retourner  au champs  de bataille, on songe à rebander ses vieilles blessures. Cependant je ne pense pas que des malheurs prochains éclatent: peuples et rois sont également recrus; des catastrophes imprévues ne fondront pas sur la France: ce qui me suivra ne sera que l'effet de la transformation générale. On touchera sans doute à des stations   pénibles; le monde ne saurait changer de face (et il faut qu'il change) sans qu'il y ait douleur. Mais, encore un coup, ce ne seront points des révolutions à part; ce sera la grande révolution allant à son terme. Les scènes de demain ne me regardent plus; elles appellent d'autres peintres: à vous, messieurs.
En traçant ces derniers mots, ce 16 novembre 1841, ma fenêtre, qui donne à  l'ouest sur les jardins des Missions étrangères, est ouverte: il est six heures du matin; j'aperçois la lune pâle et élargie; elle s'abaisse sur la flèche des Invalides à peine révélée par le premier rayon doré de l'Orient: on dirait que l'ancien monde finit et que le nouveau commence. Je vois les reflets d'une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. Il ne me reste qu'à m'asseoir au bord de ma fosse, après quoi je descendrai   hardiment, le Crucifix à la main, dans l'Eternité.

Chateaubriand, fin des Mémoires d'Outre-Tombe (4e partie, livre XII, 10)

COMPREHENSION 

1)Expliquez la métaphore à la ligne 1.

2) Relevez  les expressions se rapportant à la souffrance et  à la difficulté  et discutez  les connotations qui y sont rattachées

INTERPRETATION

1) Étudiez le lieu de l’écriture  aux lignes 19-25.

2) « Crucifix » et « Eternité » prennent des majuscules que le langage n’impose pas : commentez cet usage.

3)Nombre d’images renvoient  à  ce  sentiment de la fin,  l’attente de la mort qui devient la conquête de l’éternité : précisez en quoi

REFLEXION PERSONNELLE

À partir des Mémoires d’Outre-tombe   de  Chateaubriand  vous présenterez le rôle du souvenir
et    des Mémoires dans les œuvres  littéraires des écrivains romantiques.  (300 mots environ).



 b)   Saggio breve

 Dopo avere analizzato l’insieme dei documenti, formulate un saggio breve in riferimento
 al tema proposto (circa 600 parole).


La Nature chez les poètes romantiques : analogies  et différences


J'allais alors d'un pas plus tranquille chercher quelque lieu sauvage dans la forêt, quelque lieu désert où rien ne montrant la main des hommes n'annonçait la servitude et la domination, quelque asile où je pusse croire avoir pénétré le premier, et où nul tiers opportun ne vint s'interposer entre la nature et moi. C'était là qu'elle semblait déployer à mes yeux une magnificence toujours nouvelle. L'or des genêts et la pourpre des bruyères frappaient mes yeux d'un luxe qui touchait mon coeur; la majesté des arbres qui me couvraient de leur ombre, la délicatesse des arbustes qui m'environnaient, l'étonnante variété des herbes et des fleurs que je foulais sous mes pieds, tenaient mon esprit dans une alternative continuelle d'observation et d'admiration: le concours de tant d'objets intéressants qui se disputaient mon attention, m'attirant sans cesse de l'un à l'autre, favorisait mon humeur rêveuse et paresseuse, et me faisait souvent redire en moi-même: «Non, Salomon dans toute sa gloire ne fut jamais vêtu comme l'un d'eux. »
Mon imagination ne laissait pas longtemps déserte la terre ainsi parée. Je la peuplais bientôt d'êtres selon mon coeur, et, chassant bien loin l'opinion, les préjugés, toutes les passions factices, je transportais dans des asiles de la nature des hommes dignes de les habiter.

J-J Rousseau Correspondance, Troisième lettre à M.de Malesherbes (26 janvier 1762)


Un caractère moral s'attache aux scènes de l'automne : ces feuilles qui tombent comme nos ans, ces fleurs qui se fanent comme nos heures, ces nuages qui fuient comme nos illusions, cette lumière qui s'affaiblit comme notre intelligence, ce soleil qui se refroidit comme nos amours, ces fleuves qui se glacent comme notre vie, ont des rapports secrets avec nos destinées.
Je voyais avec un plaisir indicible le retour de la saison des tempêtes, le passage des cygnes et des ramiers, le rassemblement des corneilles dans la prairie de l'étang, et leur perchée à l'entrée de la nuit sur les plus hauts chênes du grand Mail. Lorsque le soir élevait une vapeur bleuâtre au carrefour des forêts, que les complaintes ou les lais du vent gémissaient dans les mousses flétries, j'entrais en pleine possession des sympathies de ma nature. Rencontrais-je quelque laboureur au bout d'un guéret ? je m'arrêtais pour regarder cet homme germé à l'ombre des épis parmi lesquels il devait être moissonné, et qui retournant la terre de sa tombe avec le soc de la charrue, mêlait ses sueurs brûlantes aux pluies glacées de l'automne : le sillon qu'il creusait était le monument destiné à lui survivre.

François-René  de Chateaubriand  Mémoires d’Outre-tombe , 1848 (première partie, livre III, chapitre XIII)

Elle me dit : "Je suis l'impassible théâtre
Que ne peut remuer le pied de ses acteurs ;
Mes marches d'émeraude et mes parvis d'albâtre,
Mes colonnes de marbre ont les dieux pour sculpteurs.
Je n'entends ni vos cris ni vos soupirs ; à peine
Je sens passer sur moi la comédie humaine
Qui cherche en vain au ciel ses muets spectateurs.

"Je roule avec dédain, sans voir et sans entendre,
A côté des fourmis les populations ;
Je ne distingue pas leur terrier de leur cendre,
J'ignore en les portant les noms des nations.
On me dit une mère et je suis une tombe.
Mon hiver prend vos morts comme son hécatombe,
Mon printemps ne sent pas vos adorations.

"Avant vous j'étais belle et toujours parfumée,
J'abandonnais au vent mes cheveux tout entiers,
Je suivais dans les cieux ma route accoutumée,
Sur l'axe harmonieux des divins balanciers.
Après vous, traversant l'espace où tout s'élance,
J'irai seule et sereine, en un chaste silence
Je fendrai l'air du front et de mes seins altiers. "

Alfred de Vigny La maison du berger, 1844


Sono salito su la più alta montagna: i venti imperversavano; io vedeva le querce ondeggiar sotto a' miei piedi; la selva fremeva come mar burrascoso, e la valle ne rimbombava; su le rupi dell'erta sedevano le nuvole - nella terribile maestà della Natura la mia anima attonita e sbalordita ha dimenticato i suoi mali, ed è tornata alcun poco in pace con se medesima.
Vorrei dirti di grandi cose: mi passano per la mente; vi sto pensando! - m'ingombrano il cuore, s'affollano, si confondono: non so più da quale io mi debba incominciare; poi tutto a un tratto mi sfuggono, e prorompo in un pianto dirotto. Vado correndo come un pazzo senza saper dove, e perché: non m'accorgo, e i miei piedi mi trascinano fra precipizi. Io domino le valli e le campagne soggette; magnifica ed inesausta creazione! I miei sguardi e i miei pensieri si perdono nel lontano orizzonte. - Vo salendo, e sto lì - ritto - anelante - guardo ingiù; ahi voragine! - alzo gli occhi inorridito e scendo precipitoso appiè del colle dove la valle è più fosca. Un boschetto di giovani querce mi protegge dai venti e dal sole; due rivi d'acqua mormorano qua e là sommessamente: i rami bisbigliano, e un rosignuolo - ho sgridato un pastore che era venuto per rapire dal nido i suoi pargoletti: il pianto, la desolazione, la morte di quei deboli innocenti dovevano essere venduti per una moneta di rame; così va! or bench'io l'abbia compensato del guadagno che sperava di trarne e mi abbia promesso di non disturbare più i rosignuoli, tu credi ch'ei non tornerà a desolarli? - e là io mi riposo. - Dove se' ito, o buon tempo di prima! la mia ragione è malata e non può fidarsi che nel sopore, e guai se sentisse tutta la sua infermità! Quasi quasi - povera Lauretta! tu forse mi chiami - e forse fra non molto io verrò. Tutto, tutto quello ch'esiste per gli uomini non è che la lor fantasia. Dianzi fra le rupi la morte mi era spavento; e all'ombra di quel boschetto io avrei chiusi gli occhi volentieri in sonno eterno. Ci fabbrichiamo la realtà a nostro modo; i nostri desideri si vanno moltiplicando con le nostre idee; sudiamo per quello che vestito diversamente ci annoja; e le nostre passioni non sono alla stretta del conto che gli effetti delle nostre illusioni. Quanto mi sta d'intorno richiama al mio cuore quel dolce sogno della mia fanciullezza. O! come io scorreva teco queste campagne aggrappandomi or a questo or a quell'arbuscello di frutta, immemore del passato, non curando che del presente, esultando di cose che la mia immaginazione ingrandiva e che dopo un'ora non erano più, e riponendo tutte le mie speranze ne' giuochi della prossima festa. Ma quel sogno è svanito! e chi m'accerta che in questo momento io non sogni? Ben tu, mio Dio, tu che creasti gli umani cuori, tu solo, sai che sonno spaventevole è questo ch'io dormo; sai che non altro m'avanza fuorché il pianto e la morte. 

Ugo Foscolo Ultime lettere di Jacopo Ortis , 1802













François-René, vicomte de Chateaubriand, né à Saint-Malo le 4 septembre 1768 et mort à Paris le 4 juillet 1848








Portrait de Chateaubriand par Anne-Louis Girodet-Trioson


Montboissier, juillet 1817


Le chant de l’oiseau dans le bois de Combourg³  m’entretenait d’une félicité que je croyez atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. Je n’ai plus rien à apprendre , j’ai marché plus vite qu’un autre , et j’ai fait le tour de la vie. Les heures fuient et m’entraînent ; je n’ai pas même la certitude de pouvoir achever ces Mémoires. Dans combien de lieux ai-je déjà commencé à les écrire, et dans quel lieu les finirai-je ? Combien de temps me promènerai-je au bord des bois ? Mettons à profit le peu d’instants qui me restent ; hâtons-nous de peindre ma jeunesse , tandis que j’y touche encore : le navigateur, abandonnant pour jamais un rivage enchanté, écrit son journal à la vue de la terre qui s’éloigne et qui va bientôt disparaître.

 Mémoires d’outre-tombe, 1848


  



Écritures pp 20-27